« En avant dans toutes les directions » (Massicot, The Ex – Cave12, 13 déc.)

couv.JPG

SUPER_JOIE FANTASTIQUE MERCREDI SOIR !, comme dirait Cave12. Enfin, je le fais pas aussi bien qu’eux. Avec deux groupes bien connus dont la rencontre relève de l’évidence.

massicot 1.JPG

Massicot installe un drôle de ballet déséquilibré et mutique.  D’un côté, les tropiques, les rythmes chaloupés et entraînants. De l’autre, la guitare atone, stridente et répétitive. La voix scandée, presque martiale par moment et parfois chantée en letton, je crois – ce qui d’ailleurs n’a rien à voir.

massicot 3.JPG

C’est un inconfort étrange, un brin absurde, bizarrement déviant et plaisant. Quelque chose comme l’équivalent musical de Buster Keaton.

massicot 2

Un musique intense, tendue. La concentration des musiciennes est palpable sur scène. Ce qui n’empêche pas une bonne dose de complicité d’ailleurs.

the ex 5

Quel pied de revoir The Ex et leur agit-prop-punk à nul autre pareil ! Ca faisait presque longtemps – si on omet les projets parallèles vus entre-temps et qui passent régulièrement dans le coin.

the ex 2.JPG

Le groupe a beau exister depuis un paquet d’années – 1979, quand même, ils détestent rien plus que l’ennui et présentaient donc un set entièrement nouveau, pour un album à venir. La motivation était grande et le set commence pied au plancher. Et Terrie et Andy ne tardent pas à se lancer dans un de leurs fameux duel de guitares ferrailleux. Une copine souffle : « Ah ouais, The Ex, c’est la baston, en fait ! »

the ex 3.JPG

Sans connaître les titres, on reconnait la patte typique des hollandais bruyants  – en fait, il n’y a que la moitié du groupe qui est originaire des pays-bas – les hymnes bruitistes frénétiques où la musique du groupe a des accents de fanfare noise – surtout depuis qu’ils ont trois guitares. Un long titre sonique répétitif, presque instrumental. D’autres ambiances plus retenues, avec parfois la voix presque enfantine de Katherina.

guitare

The ex, 38 ans d’âge.

Ce groupe a quelque chose d’un ovni, quand même. Ou d’un miracle. Sa manière de faire ce post-punk à la fois naîf et vindicatif, expérimental et bruitiste, n’appartient qu’à lui.  The Ex, c’est l’antithèse du math-rock.

l objet de nos questionnements.JPG

Sac poubelle avec boules de mousse collées dessus, utilisé par Terrie pour jouer de la guitare. Objet de nos questionnements.

Et pour Rad-Yaute, c’était un peu  « Foward in all directions »  ce soir-là, aussi. Vu que ça a été l’occasion d’une expérimentation avec la vidéo. Une interview filmée par Mister David, aussi connu sous le nom de LiveGenevaTV MC. On attend le résultat avec une certaine, euh, appréhension.

>>>>>>>>>> MASSICOT

>>>>>>>>>>> THE EX

Massicot/Housewives split 7″

massicot hswvsLes split 7″ scellent en général l’amitié et la proximité artistique de deux groupes. C’est le cas avec ce disque que partagent les genevoises de Massicot et les anglais de Housewives, qui ont joué ensemble sur bon nombre de scènes et dont les approches déviantes du rock ont un air de parenté évident.

Une voix, monocorde, parlée, débite un fil tendu. Autour, les arabesques et accidents de la musique. Des petites notes de guitare, lumineuses et pétillantes, plombées tout à coup par une partie lourde et stridente. Massicot invente une transe électrique naïve et nerveuse – un peu dans le sillon d’anciens comme Dog faced hermans – et je crois bien que Kokteilis est mon morceau préféré du groupe.

Comme à leur habitude, Housewives, réunit des éléments totalement disparates dans un ensemble dont on se demande comment il tient. Leur EXC. 281016 est à la fois linéaire, répétitif, épars et aléatoire. Un post-punk crispant et déshumanisé, la tension sourde à l’état pur, suicidé par une fin abrupte. Faut vraiment découvrir ce groupe incroyable, avec une petite préférence pour les premiers enregistrements, plus punks.

 

Massicot/Housewives split 7″ (Blank Editions / Hands In The Dark / Red Wig / Et Mon Cul C’est Du Tofu? / Harbinger Sound)

>>>>>>>>>>>>>>>>>> MASSICOT

>>>>>>>>>>>>>>>>>>>> HOUSEWIVES

« Solides bolides » (Smutt, Korto – Café Chateau-rouge, 20 mai)

korto rouge 1

Je sais pas si c’est le printemps mais les concerts bourgeonnaient sacrément ce weekend-là. Vendredi, Nurse et Fakirs à Chateau-rouge, le dernier show de Komodo experience à la Spirale et Third project, entre autres, à la Brasserie pirate. Et puis ce samedi, une affiche assez éclectique qui proposait deux des groupes les plus intéressants du coin : Smutt et Korto.

smutt 1

Smutt est un des groupes les plus actifs de la région. Ils revenaient d’une mini-tournée en Espagne et ont sorti un 7″ il y a peu.

smutt 2

Les Anneciens ont balancé pied au plancher leur set de punk-rock soutenu et teigneux, agrémenté de quelques reprises bien chouettes.

korto 1

Korto avait un son plus brut que d’habitude – c’est Smutt qui avaient fait la balance pour eux ou quoi ? Peu importe. Les mélodies envoûtantes et aériennes, la paire basse-batterie bien charpentée avec un batteur aux rythmiques immuables assez hypnotisant, tout est là et le groupe maîtrise totalement son propos.

Korto 2.JPG

Juste le regret d’avoir été si peu nombreux à apprécier et soutenir ces deux groupes. L’intention de soutenir la scène locale et les groupes indépendants est louable mais ça doit quand même être possible de faire davantage passer le mot.

Ceci dit, on n’a pas besoin d’être des centaines pour passer une excellente soirée. Et ceux qui étaient là étaient clairement les meilleurs.

korto rouge 2.JPG

Smutt

Korto

OWUN, 2.5

cover.jpg

Faudrait être archéologue. Ou spéléo, pour inspecter en profondeur et identifier les couches, les multiples strates qui constituent la musique des Grenoblois d’Owun. Il faut dire que la formation n’en est pas à son coup d’essai. Le groupe existe depuis environ une vingtaine d’années et 2.5, sorti sur le label Reafforests, grenoblois lui aussi, est son cinquième album.

Les neufs titres qui composent ce nouveau disque tissent tous les motifs mélodiques des synthés, parfois d’inspiration très new-wave/cold-wave, et quelque chose de plus épidermique, de plus rock. On pourrait s’amuser au jeu des rapprochements avec d’autres formations explorant ces territoires hybrides. Le groove aquatique de Foul pourrait rappeler Tortoise, Tom tombe a un air de parenté avec la trance glaçée d’Electric electric et All of us, avec ses voix trafiquées semblant suivre leur propre cours sur une musique qui défile, fait un peu penser à la noise cinématographique et rêveuse de Zëro…

Mais, au final, Owun creuse un sillon qui lui est propre. Les synthés pratiquent un espèce de pointillisme, comme dans Tom tombe et ses sonorités Steve Reichiennes, semblant chercher le point d’éblouissement où les sens se troublent, où la perception se modifie. Kaléidoscopes de motifs sans fin, géométries étranges, symétries, points de fuite. La répétition hypnotique – certains morceaux dépassent les dix minutes – finit d’engourdir les sens. On se laisse passer de l’autre côté, prisonnier de cette bulle d’illusions cotonneuse et inconfortable.

Mais l’engourdissement est risqué. Les longs passages martelés par des rythmes binaires débouchent souvent sur des nappes de bruits stridents, des océans, et les répétitions aboutissent régulièrement à des déflagrations noise. Des embrasements où toute nuance s’estompe, où les rythmes disparaissent et où tous les sons se fondent dans une distortion de fin du monde. Owun sait faire du bruit, beaucoup de bruit.

Bref, on ne peut pas trop reprocher à Owun de suivre une mode ou de se cantonner à un style facilement identifiable. Ces francs-tireurs contruisent une musique pensée et unique, à la fois dansante et martiale. Et cet album cohérent et pas toujours facile d’accés est une excellente occasion de découvrir ce groupe à contre-courant.

Owun, 2.5 (Reafforests)

Owun bandcamp

Reafforests

Tôle froide, Owun, Lynhood – La Reliure, 18 fév.

15068883_1014292715383490_5222512530434745808_o.jpg

C’est à La Reliure, vieille baraque occupée par des ateliers artistiques à la facade psychédélique tout à fait incroyable, que se déroulait finalement ce concert.

TF 2.JPG

D’abord les lyonnaises de Tôle froide. Le trio propose une musique entre post-punk (un peu) rageur et pop acidulée. Des (petites) cousines de Massicot, en quelques sortes.

TF 1.JPG

Avec du chant en français, comme il sied bien à ce style à la fois revendicatif et naïf, leur set était frais et bien dynamique. Et elles avaient de jolies cassettes et patchs sur leur table de distribution.

owun 2.JPG

Owun sont Grenoblois et ce concert était l’étape genevoise d’une tournée à l’occasion de la sortie de leur album.

owun-3

Son massif, rythmiques répétitives, immuables, kaléidoscope d’effets et de réverbérations. La musique du trio est à la fois dansante et hypnotique, énergique et froide, martiale et aérienne.

owun-4

Un cocktail bien personnel, qui se mûrit dans le temps et demande de l’attention. D’ailleurs de nombreuses personnes – enfin, proportionnellement à la petite foule présente, hein – se sont assises au fil du set. L’impression d’avoir fait un voyage, transporté hors du temps… C’est donc que cette étrange machine fonctionne.

Lynhood clôturait cette soirée mais je n’ai fait qu’apercevoir ce projet solo qui semble tracer une ligne fragile et originale entre mélodies délicates et des éléments plus bruitistes. Elle aussi a sorti un disque sur le même label grenoblois, Reafforests.

hate.JPG

« Noisy pop choucroute en orbite » (Korto – Bouffon de la taverne, 16 janvier)

 

DSCN0553

Il y avait une offre pléthorique de concerts ce samedi-là : chanson dégénérée au Cabinet (Ventre de biche – mais qui a été annulé), dernier concert à la Machine utile à Annecy, mais aussi la première édition de ce festival dédié à la musique psyché, le « Psych fest ». Pour lequel le Bouffon de la taverne, avec ses affiches vintage de Pink Floyd et Frank Zappa, était à coup sûr l’écrin idéal.

psych fest

Arrivé un peu en avance, c’est l’occasion de jeter un oeil sur les productions de Pop club records et de faire connaissance avec cette asso, qui organise le festival. Bon, je précise que le psyché, à priori, c’est pas trop mon truc, pas mon univers. Je suis là par curiosité, histoire de découvrir quelque chose de différent. Les pochettes de disques sont jolies, à l’image de l’affiche bien classe du festival. On retrouve ces accumulations typiques du psyché, qu’on connait tous. Y’a comme une créativité débridée et naîve, qui est marrante. Finalement, des styles artistiques actuels  – je pense au Dernier cri, ou à certains artistes street-art – sont un peu une forme de psychédélisme dégradé…

DSCN0551

Trêve de considérations philosophico-graphiques aléatoires, Korto s’empare de la scène. Trio dans lequel on retrouve 2/3 (basse/batterie) des Space fisters – pour un trip un peu différent et un peu pareil, donc – et qui montait pour la première fois sur scène ce soir-là. Cool.

Je suis pas spécialiste mais, d’entrée de jeu, on retrouve bien le fil rouge kraut promis par l’alléchant (et excellent) texte de présentation du festival. Un son brillant et un peu métallique, des motifs répétitifs, une batterie millimétrique… Un côté à la fois avant-gardiste et désuet, si une telle chose est possible. Durant leur set, j’ai pensé à ce morceau ultra-connu – « Psyché rock » de Pierre Henry…

On imagine bien le plaisir qu’ont ces gars à jouer avec cette forme, à maîtriser ses effets (car effets il y a). A bloquer sur le petit riff sec et répétitif pour tout à coup gonfler le tout dans une grosse poussée de fièvre sonique dont le trio stoner a le secret.

DSCN0557

L’ensemble fait une impression assez propre, léchée, notamment avec des voix qui tiennent davantage du choeur éthéré (normal pour du space-rock, ha ha !. … Hum…). Et moi qui vient du punk-rock et qui ne peux pas m’empêcher de donner mon avis personnel sur les groupes que je vois, j’étais un peu en manque d’abrasion et d’uppercuts dans le bide…

Mais bon, Korto s’ajoute sans problème à la liste des groupes  excellents du coin !

PS Il y avait deux autres groupes après, que je n’ai point vus.