« Poême de bruit » (Korto, L’Effondras – Brin d’Zinc, 31 mars)

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Retour au Brin d’Zinc pour un concert organisé par John et Salomé*, une toute nouvelle asso (dans laquelle on retrouve des membres du groupe Don Glow) dédiée aux musiques psychés sous toutes leurs formes.

Korto ne sont pas inconnus au bataillon, c’est un groupe qui tourne très régulièrement et a justement sorti un 7″ avec les susnommés Don Glow.

Paire basse-batterie ronflante, véloce, qui fait un boulot terrible tandis que la guitare vient y poser ses motifs planants ou stridents. Le psyché-rock de Korto, c’est une pincée de froideur kraut hallucinée, un peu d’huile stoner pour le moteur, sans oublier un brin de pop dans la voix éthérée qui surfe sur l’ensemble avec nonchalance, et rappelle certains groupes noisy-pop anglais des années 90.

Vous assemblez tout ça, vous y mettez (note la touche stylistique locale) un coup de clé à molette bien serré et vous avez un joli bolide rétro-futuriste prêt à vous emmener vers les étoiles.

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De L’Effondras, on ne connaissait que peu de choses. Une réputation de groupe à part, quelques chroniques et l’écoute d’un disque, impressionnant, où tout semble pensé, travaillé, mûri. La hâte d’aller à la rencontre physique de leur musique le disputait à la curiosité à l’approche de leur concert au Brin de zinc, sur la route d’une tournée pour la sortie de leur deuxième album, « Les Flavescences ».

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Dès les premiers accords, l’atmosphère est tendue, habitée. Le trio est arc-bouté sur ses instruments, respire la concentration. On les sent déterminés à donner quelque chose de fort, au service de leur musique à la fois grandiose et épurée. Notes esseulées, esquisse de mélodie, sans cesse reprise, sans cesse amplifiée et ornée.

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La présence de l’Effondras pouvait étonner dans une soirée dont la couleur annoncée était plutôt la musique psychédélique. A priori, avec L’Effondras, on est à mille lieux de la musique psyché. Loin des déluges de fuzz, des ritournelles garage estampillée sixties ou des solos tonitruants à la wah-wah. L’Effondras, c’est tout le contraire : le dépouillement, la sobriété, tant au niveau du son que des mélodies. C’est l’anti-psyché. Ou alors : psychédélique dans un tout autre sens, un sens austère et beau. Moins porté sur les paradis artificiels et plus sur une contemplation violente, sur l’obscurité et le mystère.

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En fait, ces types donnent l’impression de jouer du rock avec une rigueur d’instrumentistes classiques et leur musique elle-même explose les cadres du rock. Elle en garde pourtant toute la violence – des références comme Sonic Youth ou les pointures du post-rock sont régulièrement évoquées – mais les atmosphères puissamment émotionnelles qu’elle convoque sont d’une intensité, d’une ferveur qu’on ne trouve pas dans le rock, ou presque pas. C’est au-delà. C’est à la fois plus sombre et plus lumineux. Il y a quelque chose d’intemporel, de vif, de sensible et de troublant.

Une belle rencontre.

*Pourquoi « John et Salomé« , me direz-vous ? Parce que Les Nuls. Et je ne sais pas si l’idée de passer le sketch en version audio au début du concert – un dialogue de faux film porno, pour ceux qui ne connaissent pas – sera reconduite à chaque fois, mais c’est une idée des plus conviviales.

PS Toutes les photos sont de Lionel Fraix. Merci à lui. Pour une raison tout à fait indépendante de ma volonté il n’y a que des photos de L’Effondras. C’est pas fait exprès.

L’Effondras

Korto

John & Salomé

Tôle froide, Owun, Lynhood – La Reliure, 18 fév.

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C’est à La Reliure, vieille baraque occupée par des ateliers artistiques à la facade psychédélique tout à fait incroyable, que se déroulait finalement ce concert.

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D’abord les lyonnaises de Tôle froide. Le trio propose une musique entre post-punk (un peu) rageur et pop acidulée. Des (petites) cousines de Massicot, en quelques sortes.

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Avec du chant en français, comme il sied bien à ce style à la fois revendicatif et naïf, leur set était frais et bien dynamique. Et elles avaient de jolies cassettes et patchs sur leur table de distribution.

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Owun sont Grenoblois et ce concert était l’étape genevoise d’une tournée à l’occasion de la sortie de leur album.

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Son massif, rythmiques répétitives, immuables, kaléidoscope d’effets et de réverbérations. La musique du trio est à la fois dansante et hypnotique, énergique et froide, martiale et aérienne.

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Un cocktail bien personnel, qui se mûrit dans le temps et demande de l’attention. D’ailleurs de nombreuses personnes – enfin, proportionnellement à la petite foule présente, hein – se sont assises au fil du set. L’impression d’avoir fait un voyage, transporté hors du temps… C’est donc que cette étrange machine fonctionne.

Lynhood clôturait cette soirée mais je n’ai fait qu’apercevoir ce projet solo qui semble tracer une ligne fragile et originale entre mélodies délicates et des éléments plus bruitistes. Elle aussi a sorti un disque sur le même label grenoblois, Reafforests.

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Un soir sur terre avec Patti Smith

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« An intimate evening of words and songs with Patty Smith » disait le programme du festival Antigel. L’écriture et le chant, qu’est-ce qui peut mieux définir l’art de la fameuse poétesse rock ?

Elle choisit quelques poèmes. Et, surtout, lira des extraits de Just kids, le récit autobiographique candide de ses jeunes débuts à New-York, de sa rencontre avec Robert Mapplethorpe et de sa mutation progressive en artiste. Pas de fioriture chez Patti Smith : l’écrit est là pour partager l’émotion du souvenir et rendre hommage. Robert Mapplethorpe, Jean Genet, Fred « Sonic » Smith (son mari, guitariste du MC5), William Blake, parmi les figures évoquées et chéries. La petite histoire, celle d’une adolescente sans-le-sou débarquée dans les avenues de la Grosse pomme avec pour bagage son amour fou de la littérature, se mèle à la grande, celle de l’art au XXe siècle, celle que retiennent les livres.

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Sur scène, elle est accompagnée par son fils, le guitariste Jackson Smith. Quand elle ne lit ou ne chante pas, Patti Smith plaisante avec le public et, au milieu de ses livres, de ses feuillets, de sa guitare et du micro, se trompe, se perd. Et son fils de jouer son rôle de fils, prévenant, enclenchant sa pédale lorsqu’elle a omis de le faire ou lui rappelant l’ordre des morceaux. Les deux jouant ainsi au public un petit numéro de comédie familiale assez charmant.

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Mais lorsqu’elle chante, Patti Smith n’a plus rien d’une vieille dame perdue. La flamme de ses hymnes habités, comme « Ghost dance », est toujours vivace, soutenue par la guitare avisée de Jackson Smith aux accents Americana. Sa voix, qui ressemble avec l’âge de plus en plus à celle de Lou Reed, mêle inextricablement tendresse et colère, au point que les deux soient indiscernables. D’ailleurs, qui peut dire si « Because the night » (dont elle racontera l’écriture – en fait un tube de Bruce Springsteen, qu’elle a d’abord dédaigné et dont les paroles lui sont venues dans un moment de désœuvrement et de frustration), qui peut dire si cette chanson est une chanson d’amour ou bien de défiance et de détermination ?

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A plusieurs reprises, elle évoque l’état du monde, la situation politique, fait lever les poings, appelle à la désobéissance. Le fil rouge qui parcourt son œuvre, c’est une haute idée de l’artiste, héritée du romantisme et incarnée dans le rock, dans laquelle création, poésie et insoumission se mêlent et sont inséparables. Il y a peu, elle disait : « Aujourd’hui, il y a une nouvelle tendance qui est d’approcher l’art avec une vision entrepreneuriale […] Pour moi, ce n’est pas de l’art, c’est autre chose : une forme d’expression liée à la culture et aux réseaux sociaux. »* Au vu du prix du billet d’entrée, on est loin des idéaux alternatifs du punk, mais Patti Smith porte encore et toujours cette vision intempestive, incandescente, de l’art.

Heureux d’avoir pu en être le témoin ce soir-là.

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* Interview parue dans Les Inrockuptibles, n°1063.

« A shape of noise to come » (A Shape – Le Poulpe, 13 janv.)

a shape nb1.JPGUne bonne fée noise semble avoir touchée la programmation du Poulpe en ce début de mois de janvier, après la soirée terrible de vendredi dernier. Et quoi qu’il en soit, tant qu’ils en donnent, on prend, on prend !

Un seul groupe à l’affiche de l’auberge sonique de Reignier ce soir-là : A Shape. Un groupe qui n’a pas encore sorti de disque et où on retrouve Sasha, la chanteuse d’Heliogabale.

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Les morceaux de A Shape ont été mixés par Lee Ranaldo, le guitariste de Sonic Youth et il semble que la référence aux New-Yorkais soit assez incontournable, tant les entrelacs de guitare cristalline et la voix féminine se détachant sur la masse sonore y font parfois penser.

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Mais un Sonic Youth en morceaux, avec le verre concassé et les angles coupants dedans. A Shape, c’est les mélodies sucrés et les coups de butoir, le miel et le gravier mélangés dans la bouche.

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Les morceaux souvent assez longs du groupe déploient leurs spirales de résonnances, d’échos et de distortions. Des ambiances de fièvre et de confusion. Mais la confusion, c’est le sexe.

La chanteuse a un peu des airs de Kim Gordon française. Elle semble parfois s’adresser à un interlocuteur invisible pour dérouler ses histoires ou ses imprécations fiévreuses. D’une manière très proche de celle d’Ivy Claudy, la voix de The Sloks, ce groupe turinois qui avait fait forte impression lors de leur passage à Annecy et dont vous devriez entrendre reparler prochainement dans ces pages.

Bon sang, mais quelle chance de voir de tels groupes dans une salle si intime ! Ô émo-noise kid, fan des 90s, où étais-tu ce soir-là ? Et dire qu’en septembre Le Poulpe va ouvrir une salle de 400 places… On a eu droit à un CD de l’album pour quelques euros. Pour les autres, il y a toujours le bandcamp où on peut écouter trois des morceaux du groupe. En attendant un disque qui finira sûrement par venir.

« Torrents d’amour soniques » (Black Mont-Blanc, Noyades, Satan – Le Poulpe, 6 janv.)

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Trois groupes au Poulpe, c’était presque un mini festival !

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Et trois groupes bruyants, en plus. C’est Black Mont-Blanc qui a ouvert le bal, bien qu’on était un peu trop serrés – mais c’est qu’il y a du monde – pour danser. Black Mont-Blanc, c’est un nouveau groupe – c’était leur premier concert – où, en plus du guitariste chanteur, l’on retrouve deux membres de We are the incredible noise, si je ne me trompe pas. Incredible noise qui répète également au Poulpe. Parce que le Poulpe, en plus d’organiser de bons concerts, sont aussi une pépinière de groupes. S’il-vous-plaît.

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Trio, donc. C’est beau les trios. C’est pur. Surtout quand ça envoie du noise-rock furibard, tendu. Breaks nerveux, cassures, voix qui s’étrangle en arrière-fond du torrent de bruit.

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Quelques morceaux plus planants aussi, où le groupe se laisse aller à des arpèges méditatifs. Belle entrée en matière, pas de doute, et qui donne grandement envie d’en voir et d’en écouter plus. Voilà un groupe qui devrait aller taquiner les Worst in me et autres Tuco de l’autre côté de la frontière.

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Noyades

La salle s’est remplie encore un peu plus, si c’était possible, pour Noyades. Ce trio lyonnais vient de sortir son premier album et enchaine les weekends de concerts dans une tournée en pointillés.

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La musique de Noyades est une sorte de croisement entre noise-rock (grosse basse) et musique psyché (cavalcades effrénées, portes de la perception traversées depuis belle lurette).

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Le tourbillonnement sonique entêtant fait son effet étourdissant, mais mes oreilles formatées au post-hardcore ne peuvent pas s’empêcher d’être génées par le côté très linéaire de cette musique, qui me semble désuet. J’essaye mais j’arrive pas vraiment à m’y faire.

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Satan viennent tout droit de Grenoble et ont asséné un set totalement furieux et totalement jouissif. Rafales de blasts incessantes. Grind-punk bloqué sur l’ultra-violence.

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Le chanteur de ce magnifique groupe portait un tee-shirt de Danzig et, à bien y réfléchir, leur « musique » a un petit côté rock ‘n roll, un petit côté horror-punk. Mais petit.

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All hail Satan !

Pour les adorateurs du malin et les amateurs de bruit vomi que nous sommes, par contre, c’était 100% de bonheur.

« Punk porn » (Tuco, Orso, Cocaine piss – Undertown,16 déc.)

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Ouh la la la, mais c’est que Drone to the Bone nous proposait ce soir-là un petit concert avec trois groupes variés comme on aime, avec en plus une pincée de folie noise plus qu’aguichante. Hop hop hop, on se presse à l’Undertown, très chouette salle située près de l’aéroport de Genève, malgré le brouillard à couper au couteau.

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Le son net et précis servait de belle manière le hardcore massif de Tuco, bloqué sur un tempo lourd, piéton et poisseux,

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Alternance de voix, cassée, hurlée, au bord de l’apoplexie (j’adore utiliser ce mot mais, en vérité, je suis pas sûr qu’il soit médicalement très approprié) pour Laurent, le bassiste, plus tendues et sombres pour les deux autres.

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Tuco, c’est de la belle mécanique, lourde, massive et cependant bien huilée , réagissant au quart de tour. Un disque, album ou autre, devrait voir le jour quelque part en 2017 et il est attendu de pied ferme.

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Avec Orso, la cavalerie est de sortie. C’est pas moins de 3 guitaristes qui s’alignent sur scène en plus du bassiste. Pas de chant, par contre. On sent bien chez ce groupe la volonté de faire une musique différente, bâtie sur autre chose que l’inusable couplet-refrain, en un mot quelque-chose de « post ». Et cette musique à la fois puissante et planante propose ses moments intéressants, dans lesquels l’instrument qui ressort le plus est finalement la batterie et ses variations.

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Mais par contre, elle est si est si monobloc, si monocorde et linéaire, qu’elle peine quand même à susciter l’émotion. Chez moi, en tous cas. Coup dans l’eau. Ou alors il y a quelque chose que je n’ai pas compris, ce qui est tout à fait possible.

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Cocaine piss arrive de Belgique avec une jolie réputation d’un des groupes les plus dingues du moment sur scène. Et, de fait, il se sera passé pas mal de trucs fous pendant leur concert court mais intense. Entre le punk en roller qui déboule tout-à-coup la scène sans crier gare pour sauter par dessus les retours et le gars qui débitait ses cours de russes au micro, ça n’a pas manqué de rebondissements.

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Mais le plus taré de tout, c’était certainement la musique du groupe. Punk-hardcore speed estampillé années 80*, traversé de drôles de soubresauts noise, sur laquelle la voix de la chanteuse rajoute une bonne couche de folie**. Une bonne fée punk a dû se pencher sur le berceau de ce groupe parce que la première fois qu’on l’entend cette voix a tendance à hérisser le poil et puis, au final, faut bien avouer que ça fonctionne à mort.

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D’autant plus que la chanteuse incarne cette folie, passant un bon moment du concert dans le public ou à terre. Les (assez nombreux) photographes et cameramen présents ne s’y trompaient pas, qui suivaient le moindre de ses mouvemens pour saisir un instant de « punk porn » (2.0). C’était un peu étrange, mais faut dire que ce groupe a quand même tout ce qu’il faut pour faire la prochaine couverture de Maximum rock’nroll (si c’est pas déjà fait, d’ailleurs ?!?) Et quoi qu’il en soit que ça fait du bien de voir un groupe pour lequel un concert c’est un peu plus qu’une pure performance musicale. RRAAAAAAAAAAAAHHHH GGGGGGGRRRRRRRRRRR PUUUNNKK YYEESSSSSSSSSSS !!!!

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*Un peu à la manière de Youth avoiders, excellent groupe vu il y a peu à la Makhno.

**De manière vraiment similaire à The Sloks, excellent groupe vu récemment à Annecy. C’est marrant les coincidences.

“Avant la musique” (Seabuckethorn, Shar, Housewives – Cave12, 11 déc.)

dscn2830Comme l’an passé, le festival Face Z (L cette année) posait ses valises à Cave12 pour une soirée de découverte musicale tout azimuth. Avec une arrivée tardive, sur les notes finales de Seabuckethorn, guitare jouée à l’archet, salves mouvantes d’accords singulièrement metalliques.

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Shar. Trio basse, batterie, ballons. Ca peut faire peur. Surtout quand la musicienne se met à astiquer une longue quéquette rose – un ballon – dès le premier morceau. En fait, la trituration virtuose des ballons se rapproche de l’utilisation bruitiste de platines ou du son déchiré d’un saxophone free-jazz. Les morceaux sont joueurs, limpides et ce free-rock malicieux, qui pourrait faire écho à Fred Frith ou à Roof, est finalement très accessible.

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Housewives ou l’obscurité. Sons stridents, amorphes, froideur, mélodies en bribes, parasitées, batterie squelettique. Le post-punk spectral de ces anglais affectionnant les pantalons feu de plancher ne ressemble à aucun autre. Peuvent jamais rien faire comme tout le monde.

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Housewives

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« Circuit court et haute tension » (Don Aman, L’Orchidée cosmique, Nevraska – Brin d’zinc, 25 nov.)

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Les concerts de groupes locaux ont un goût particulier, quelque chose en plus. Voir des gens jouer qu’on pourrait croiser au coin de la rue, dans un concert, qu’on peut suivre, contacter. C’était donc une affiche bien affriolante, que nous avait concoctée Flo Cosmique et l’asso Minimal chords vendredi soir au Brin d’Zinc, avec trois groupes novateurs, chacun défrichant un territoire propre.

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Placides, Don Aman ne craignent pas d’arriver quelques minutes avant de monter sur scène. Ils distillent une musique à la fois sensible et bruyante, portée par une voix très chantée assez belle et qui pourrait aisément trouver sa place dans une formation plus pop ou folk. Mais là, on pense plutôt à la dernière période de Fugazi ou à un groupe comme Yo la tengo, pour le côté touche-à-tout de leur musique qui visite pas mal d’atmosphères différentes.

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On ne peut pas dire que le public chambérien soit extrêmement réactif durant ce set mais c’était une belle découverte que ce jeune groupe de Dijon, qui a déjà un LP à son actif et qui commençait ce jour-là une mini-tournée de trois jours avec L’Orchidée cosmique.

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L’Orchidée, justement, le local de l’étape. Peut-être dopé par le fait de jouer à domicile – et de bénéficier d’un son bien gras, ce qui ne gâche rien -, le « One-man space fuzz band » a pris du corps et gagné en fluidité et en présence sur scène. Ses petites mélodies loopées semblaient danser en apesanteur tandis que les gros accords zébraient l’espace à grands coups de fuzz comme jamais. L’Orchidée cosmique, c’est un peu un post-rock qui ne cracherait pas sur le riff métal.

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Auteur d’un album rien moins que magnifique, Nevraska jouaient pour la première fois dans la région depuis sa sortie en septembre dernier. Peut-être était-ce le son plus agressif ce soir-là, mais le set du duo m’a paru particulièrement furieux. Ca claque, ça explose, ça tourbillonne. C’est merveilleusement dense, précis, rugueux. Je les ai vus un paquet de fois maintenant et la magie ne m’a toujours pas quitté. Ce groupe résume à sa manière vingt années et quelques d’évolution du rock/punk/hardcore et je ne peux tout simple pas croire qu’une personne qui est ou a été passionnée par cette musique puisse y être insensible. Juste : ruez-vous dessus. Quelle que soit votre chapelle, ruez-vous dessus.

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On aura même droit à un nouveau titre. Un aperçu du Nevraska post-Grave Romance. Plus épuré, laissant une place plus grande au silence, à la respiration, avant tout de même une montée en tension bloquée dans le rouge dont le duo a le secret.

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Une soirée comme on en voit trop peu souvent, donc, faisant la démonstration que la scène locale n’a besoin de personne pour procurer des frissons. Et dans un lieu idéal pour ce genre de concert qui plus est, n’hésitant pas à prendre des risques en programmant des groupes peu connus. On pourra par exemple y voir les noise-rockers titubants (et canadiens) de Alpha stategy, le 7 décembre.

Comme a dit un copain : « J’ai découvert un univers »…

Merci Elsa pour les photos !

 

“Titans puissants expresso” (Tuco, Intercostal – Villa Tacchini, 2 déc.)

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Tuco !

Juste le temps de faire un petit saut à ce nouveau festival – Mighty titans fest – organisé par les gens du groupe Colossus fall.

Et de goûter un peu du noise-hardcore furibard de Tuco, dont on peut d’ailleurs lire une interview dans ces pages.

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Rythmiques concassées, riffs tournoyant se chargeant de tension explosive. Le groupe alterne les murs du son avec des passages aux ambiances dissonantes, grinçantes où la paire basse batterie fait un boulot terrible.

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Les voix, partagées entre les trois membres du groupe, ont quelque chose de tendu et de désespéré, quasi-Neurosis-iennes. Le set fût court, avec un son se cherchant un peu au départ, mais donne envie d’en voir plus. Vivement le 16 décembre à l’Undertown avec Cocaine Piss !

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Intercostal

La Suisse est clairement un pays de géant du métal (et d’ailleurs ces deux groupes incluent tous deux des ex-membres de formations marquantes) et la prestation d’Intercostal donne tout son sens au nom du festival. Y’a pas à dire, le « massive down-tuned progressive stoner » du groupe s’écoute avec un immense plaisir. Les voix sortent de terre, la musique déplace des montagnes. C’est long, méandreux, tellement massif que c’en est presque drôle, diaboliquement et épiquement mélodique. Génial, en fait.

Et c’était que le début.

« Cosmos en sous-sol » (Loubatière/Messon, Pauvros/Kawabata – Cave12, 6 novembre)

DSCN2722.JPGCyril Messon est un jeune guitariste aux projets très divers, dont Noyades qui vient de sortir son album,  et son duo improvisé avec le batteur Rodolphe Loubatière attise la curiosité.

Ils joueront une assez longue pièce d’une trentaine de minutes, s’ouvrant en mode décalé/syncopé, comme souvent dans cette musique « libre » mais qui a aussi ses gimmicks, pour bientôt plonger dans un torrent de notes et de roulements.

L’énergie est là, mais on ne quitte jamais vraiment l’impression de flux ininterrompu et c’était un peu frustrant que ce flux ne se fixe jamais ou trop rarement dans une forme, si éphémère soit-elle. Alors que le duo se réclame (entre autres) du noise-rock dans sa bio, de noise-rock, je n’ai point entendu.

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Je ne pouvais pas rester longtemps pour le concert du duo suivant, Jean-françois Pauvros/Makoto Kawabata. Leur performance promettait d’être un trip dont ni la durée ni l’intensité sonore n’était connue. On savait juste que ça pouvait atteindre des dimensions cosmiques. L’ouverture sur des notes éthérées jouées à l’archet sur les deux guitares électriques semblait déjà flotter en apesanteur dans la stratosphère. Dieu sait où ils ont fini.