Truc de dindes ! (The Scaners, New Bomb Turks – Ayers rock boat, 11 juillet)

NBT couv.JPGTu peux en penser ce que tu veux, mais la vie réserve parfois des surprises. Comme ce groupe – New Bomb Turks – , dont tu n’avais en tout et pour tout que le souvenir lointain d’un album sur une cassette copiée et d’un article dans feu le fanzine Violence, refaisant  surface sans crier gare. Et le pire, c’est qu’il y avait une bagnole pleine de fins esprits – en fait il y en avait même deux –  prêts à faire le trajet d’Annecy jusqu’à Lyon pour aller voir si ça en valait la peine.

Scaners 2L’Ayers rock boat, c’est une grosse péniche stationnée sur le Rhône, avec une petite scène au-dessus de la cale, perdue au milieu des multiples bars de ce qui est apparemment plutôt une boîte de nuit. Un endroit génial pour voir des concerts en été en tous cas.

scaners 1.JPGC’est The Scaners qui ont ouvert les hostilités. Rock’n roll primitif et sauvage bourré de délay, de fuzz et de réverb. Et un look bien travaillé, quelque part entre les Blues brothers et les Clash. Ou quelque chose comme ça.

Scaners 3Le set des Lyonnais passe super bien et se déguste comme un vieux film de SF bien rétro, avec distance et sans prise de tête.

NBT 5.JPG

Le premier truc qu’on remarque quand on croise – au bar pour être précis –  Eric Davidson, le chanteur de New Bomb Turks, c’est que, comme la musique de son groupe qui a un côté cartoonesque, lui-même a une tête de personnage de comics. Vous savez, le menton un peu large, une espèce de houpette… Oh merde, un peu comme ça, quoi.

cowboy-henk-00

Devant la scène, les rangs se sont bien resserrés et sont compacts  avant même l’entrée du groupe. Faut pas se leurrer, quand tu vas voir New Bomb Turks, c’est pour te payer ton shoot de punk-rock parfait. Ceux qui sont venus savent très bien pour quoi ils sont là.

NBT 2

Et c’est bien évidemment exactement ce qui va se passer. Les morceaux du groupe, souvent courts et directs et qui s’enchaînent sans temps mort, semblent contenir l’énergie maximum dans le format le plus réduit possible. Formule totalement explosive.

NBT 4Les mélodies ne sont pas oubliées pour autant. New bomb Turks c’est un punk-rock originel, cramponné à ses racines rock’n roll et garage. Ce groupe plie en quatre tous les AC/DC et tous les stades de France du monde.

NBT couv ?NB.JPGLa folie du groupe fait assez rapidement effet sur la foule, qui perd tout contrôle. Le spectacle est autant dans la salle déchaînée que sur scène. Slams et pogo s’enchaînent de manière frénétique, dans une moiteur à la limite du supportable. Le punk-rock a trouvé son Ibiza.

NBT 3

Le groupe semble poser un regard satisfait sur le chaos qu’ils ont contribué à créer. Ils n’ont plus qu’à enchaîner leurs tubes survitaminés. Satisfaits d’avoir fait leur boulot. Le concert se prolongera par quelques rappels, presque obligatoires, avant de terminer cette soirée mémorable en buvant des bières sur le pont du bateau.

NBT COuv 2?NB

Comme disait une personne dans le public : « A la fin du concert, y’a plus que des copains… »

NBT 1NB

« Shellac sera toujours Shellac » (Shellac – la Belle électrique, 5 juin)

shellac couv

Tu vois, frère, c’est simple. Il y a deux types de noise-rock. Celui qui procède par accumulation, de couches de bruits, de distortion, de larsens. Tu peux mettre Unsane, Sonic Youth et tout le shoegaze et le grunge que tu veux dans cette catégorie. Et puis, il y a celui qui au contraire opère par démembrement, par dérapage rythmique controlé. Sec, percussif. Chirurgical. Et, de ceux-là, Shellac est le pape, l’épitome depuis plus de vingt ans.

Lumières sobres et fixes – la fiche technique du groupe stipule que le technicien lumière peut aller boire des bières pendant le concert -, amplis mythiques sur scène, public fervent qui se presse. La messe peut commencer… Ladies and gentlemen : Shellac of North America.

shellac 4.JPG

Shellac, c’est d’abord un son. Celui que tu t’es pris dans les dents le jour où tu as entendu les notes qui ouvrent « At action park », que ce soit aujourd’hui ou en 1994. Et le son est là, plus cristallin, plus métallique et rachitique encore que dans tes rêves.

shellac 1.JPG

Ce serait un cliché que de dire que le groupe enchaîne les tubes, vu que c’est le cas de la plupart de leurs morceaux. Mais des titres comme « Dog and pony show », « Prayer to god » ou ceux du super dernier album – 2014, quand même – conservent une sacré dose de mordant, d’énergie hargneuse et contenue qui éclate brusquement de temps à autre. Le public reste attentif mais il y avait aussi une bonne bande d’agités qui faisaient plaisir à voir.

shellac 5

Leur habituelle session de questions-réponses aura donné lieu à quelques questions débiles – réponses cinglantes de plus. Ca a été l’occasion de leur demander pourquoi ils n’avaient pas accepté de première partie de dernière minute. Decibelles avait dû annuler au dernier moment pour des raisons personnelles – Steve Albini leur a d’ailleurs rendu un chouette hommage. Je m’attendais à la réponse : ils veulent connaître personnellement le groupe et être en mesure d’assumer et de le soutenir.

shellac 3.JPG

Toujours aussi intraitables. Ils ont d’ailleurs refusé les accréditations demandées initialement par Rictus, laissant Olivier « el patron » tout dépité. Pas de pub. Pas de traitement spécial. Préfèrent être disponibles pour passer du temps avec les gens après le concert plutôt qu’accaparés par des journalistes autorisés.

shellac 2

Steve « Prayer to god » Albini

Avec ce concert mémorable, je bouclais aussi une sorte de grand chelem, de graal personnel : Unsane, Fugazi, Jesus Lizard, Shellac. La boucle est bouclée !

« Rock’n roll maximum » (Part Chimp – Usine, 26 mai)

Part chimp 1

Arrivés trop tard pour Stearica et Orso mais on chope quand même au vol le concert de ces anglais supersoniques de passage en Europe (sic). En toute bonne foi, on les connaissait à peine mais un morceau entrainant du nouvel album a suffi à nous appâter.

part chimp 5.JPG

Son massif ! Disto énôôôôôôrme ! Amplis poussés à bloc … Le volume fait partie intégrante de cette musique.

part chimp 2

Dans Part Chimp, il y a du tempo pachydermique, du riff stoner (de Brest) ventru, de la disto prête à craquer à la Unsane et même des harmonies, des mélodies limite sucrées parfois.

part chimp 6

Les anglais étaient visiblement déjà passés par l’Usine et bien contents d’y être de retour. Des gars détendus et sans attitude, avec une sacré expérience. Plus de 15 ans d’existence et 6 albums sous le bras, quand même.

part chimp 3.JPG

La quarantaine rugissante, quoi !

part chimp 4

>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>> PART CHIMP !

« Solides bolides » (Smutt, Korto – Café Chateau-rouge, 20 mai)

korto rouge 1

Je sais pas si c’est le printemps mais les concerts bourgeonnaient sacrément ce weekend-là. Vendredi, Nurse et Fakirs à Chateau-rouge, le dernier show de Komodo experience à la Spirale et Third project, entre autres, à la Brasserie pirate. Et puis ce samedi, une affiche assez éclectique qui proposait deux des groupes les plus intéressants du coin : Smutt et Korto.

smutt 1

Smutt est un des groupes les plus actifs de la région. Ils revenaient d’une mini-tournée en Espagne et ont sorti un 7″ il y a peu.

smutt 2

Les Anneciens ont balancé pied au plancher leur set de punk-rock soutenu et teigneux, agrémenté de quelques reprises bien chouettes.

korto 1

Korto avait un son plus brut que d’habitude – c’est Smutt qui avaient fait la balance pour eux ou quoi ? Peu importe. Les mélodies envoûtantes et aériennes, la paire basse-batterie bien charpentée avec un batteur aux rythmiques immuables assez hypnotisant, tout est là et le groupe maîtrise totalement son propos.

Korto 2.JPG

Juste le regret d’avoir été si peu nombreux à apprécier et soutenir ces deux groupes. L’intention de soutenir la scène locale et les groupes indépendants est louable mais ça doit quand même être possible de faire davantage passer le mot.

Ceci dit, on n’a pas besoin d’être des centaines pour passer une excellente soirée. Et ceux qui étaient là étaient clairement les meilleurs.

korto rouge 2.JPG

Smutt

Korto

« Et votre lac est rempli des larmes de vos vieux? »* (Korto, Conformists – Usine, 11 mai)

Conformists portrait

Avec un album et une tournée européenne tous les 5 ou 6 ans (la dernière date de 2011), les américains de Conformists suivent un rythme qui n’appartient qu’à eux. Leur concert à l’Usine était donc une occasion rare à ne pas louper pour les amateurs de rock pas-comme-tout-le-monde.

Avec un chanteur aux allures d’Henry Rollins dada, leur musique prend un malin plaisir à brouiller les pistes, à empiler les rythmes improbables, à bricoler des accouplements contre-nature, des pieds-de-nez et des bifurcations soudaines. Pas moyen de se laisser aller, d’être tranquilles.

Et puis se fend tout à coup d’une grosse soufflante noise-rock, groovy et dissonante à souhait. Bien jouissive après les asticotages en règle.

Conformists 0.JPG

Pas de pédale d’effet à la mode, pas de guitare en alu bling-bling. Un ampli, une guitare, un volume. Point. Presque une ambiance jazz, et apparemment, ils n’en voulaient pas plus. Pas étonnant qu’ils aient enregistré tous leurs albums chez Steve Albini. C’est un peu le roi du son brut et sans artifice, non ?

Conformists 1.JPG

Bref, un groupe éminemment sympathique, hors des modes et potache comme c’est pas possible. Les locaux de Korto jouaient en premier. J’ai loupé leur concert mais, vu l’activité intense du groupe en ce moment, ce n’est certainement que partie remise.

*Réponse du chanteur de Conformists a un gars qui lui expliquait qu’à Genève, on tapait les vieux pour s’amuser…

Korto

Conformists

« Médiathèque sonique » (Slang, Orchidée cosmique – Médiathèque de La Roche-sur-Foron, 6 mai)

Orchidée rouge

Quelques images de la médiathèque sur orbite avec Slang, un jeune groupe qui joue un rock à la fois un peu expérimental et très inluencé blues/70s, et L’Orchidée cosmique.

slang 1.JPG

Un concert dans un lieu atypique, avec les sommets embrumés en arrière-fond de grande classe.

Orchi 4.JPG

La musique en apesanteur de L’Orchidée cosmique s’y prêtait particulièrement bien et c’était l’occasion d’entendre quelques nouveaux morceaux.

Orchi 2.JPG L’Orchidée cosmique

Slang

BD

« Das Himmel über Tokyo » (Group A, GNOD – Cave12, 25 avril)

Group A 1

Quelques images des deux découvertes d’hier, Group A et Gnod à Cave12. Floues et surexposées comme il se doit.

Group A 2.JPG

Spoken-word suffoquant sur beats irradiés. Parasites, anti-musique industrielle et martiale. La musique de Group A ne semble qu’une composante parmi d’autres d’un projet total.

Group a 5 bis

Costumes, graphisme, vidéos, tout est soumis à une même esthétique radicale et négative dans laquelle on se retrouve immergé le temps de leur concert/performance. Pas très loin de ce qu’on trouve chez certains groupes hardcore/grind, d’ailleurs.

Group A 3

Gnod est un collectif noise-rock psyché anglais. La pochette de leur dernier disque laisse penser que leur musique intègre une forte dimension politique mais sur scène ça ressemblait surtout à un grand exhutoire de rock bruitiste, frontal et massif.

a3774987830_10.jpgGnod

Group A

« Feel good music / Feel bad music » (Stefano Pilia, Zu, Totorro – Brise-Glace, 8 avril)

zu 1.JPG

En raison peut-être d’une affluence trop restreinte, ce concert s’est finalement déroulé dans la petite salle du Brise-Glace. La faute à une programmation trop aventureuse ? Peu importe, on gagnait en convivialité ce qu’on perdait niveau son.

Débuts en douceur avec Stefano Pilia, assis seul face au public avec sa guitare et ses nombreuses pédales d’effets. Enfin en douceur, si on veut. Ses petites notes cristallines venant se crasher régulièrement sur des murs du son bruitistes.

stefano.JPG

Une musique tentant un pont entre entre post-rock, folk et ambient bruitiste. Assez hypnotisant.

Les italiens de Zu sont les rois de la collaboration : leur discographie bien fournie compte plus de disques réalisés avec des invités que ceux du groupe lui-même. Mais là, c’était bien Zu en trio, soit Luca T. Mai au saxophone bariton, Massimo Pupillo à la basse et le suédois Tomas Järmyr derrière les fûts.

zu 2.JPG

Ce groupe est un volcan. Une éruption continue de riffs carnassiers, de bastonnades en règle, de raclées sonores. Martèlements incessants à la batterie. Agression continue de basse rocailleuse. Et le sax qui zèbre un ciel déjà surchargé en électrons. Faut pas sortir, par ces temps-là.

zu 3.JPG

Et le plus surprenant et le plus génial avec ce groupe, c’est l’inventivité folle dont il fait preuve et qui fait parfois totalement mouche. Tout à coup, au milieu du déluge d’agression sonore, un plan arrive. Un plan incroyable qui prend tout à contre-pied, un plan que tu n’as jamais entendu auparavant et qui sonne comme c’est pas permis, comme rien d’autre.

La classe. L’engagement total d’un groupe qui écrit des pages nouvelles de l’histoire du rock. C’est rien moins que ça, Zu !

Bien que les deux groupes soient estampillés « Maths », les ambiances ensoleillées de Totorro ne pourraient pas être plus éloignées de l’ouragan qu’on vient d’essuyer. Comme quoi les étiquettes taisent autant qu’elles disent.

toto.JPG

Le groupe a décidé de jouer à même la salle, au milieu du public. Les musiciens ont l’air confiants, enchaînent les blagues avec le public. En réalité, leur musique doit autant à l’émo-rock et au post-rock des années 90 ou 2000 qu’à autre chose. Son côté lisse et déjà entendu me laisse un drôle de goût dans la bouche, me séduit pas vraiment. Musique légère et malicieuse ou produit pas dérangeant et pré-formaté, prêt à être récupéré ? Chacun tranchera. Ou pas. Y’a pas mort d’homme dans ce genre de débat de toutes façons.

En ce qui nous concerne en tous cas, on a assez tôt rejoint la nuit annecienne, où la jeunesse éméchée s’essayait déjà à quelques plongeons.