Grimheart

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Ce blog/site/zine est réalisé par Alain, anciennement guitare du groupe de hardcore annecien Bloc. Il mériterait bien le nom de fanzine puisqu’il s’agit en fait d’une sélection personnelle de groupes, triés sur le volet, la crème de la crème, et présentés dans une petite bio et discographie commentée dans le détail, accompagnées de quelques photos et vidéos.

La tonalité d’ensemble est plutôt post-hardcore, la jonction tumultueuse où se mèlent les courants – hardcore, crust, émo, métal, math et j’en passe des encore plus rigolotes – avec un groupe comme Converge en figure de proue. Pas de locaux dans ce top du hardcore d’aujourd’hui et un seul groupe français (pas que ce soit important en soi, mais bon) : les inoubliables Amanda woodward.

Plein de ferveur ardente, fait par un connaisseur, cette initiative peut être utile pour découvrir de nouveau groupes, par curiosité, ou pour celui qui aurait loupé un wagon à un moment donné. On a le droit de décrocher. Un seul regret : qu’il soit alimenté avec parcimonie. Mais en même temps, l’avantage d’internet, c’est bien que chacun publie au rythme qui lui va, aussi souvent ou aussi rarement qu’il lui plait.

Grimheart.com

Tuco, EP

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Rétropédalage de grande ampleur pour cette chronique d’un EP autoproduit sorti en… 2010. En même temps, le groupe de Duillier (Suisse) a lui-même pris un break de plusieurs années entre-temps avant de revenir aux affaires et puis, après tout, on s’en tartine, non ?

Quatre titres qui, de toute façon, méritent amplement le coup de rétroviseur. Coulés dans le même plomb, la même matière brûlante sortie du studio de Serge Morratel. Batterie poid-lourd dépassant rarement le mid-tempo, grondements de basse ferrailleuse et guitare abondant dans la distortion et la dissonance. Noise-hardcore dans le sillon d’Unsane, forcément sanglant. Même si leur référence c’est plutôt Keelhaul, d’où ils tirent leur nom.

Mais n’allez pas croire que la musique de Tuco est monobloc ou que leurs morceaux soient interchangeables. Au contraire, sous des dehors bas du front, ça ruisselle de variations finaudes, d’idées poussées dans leurs retranchements et de rebondissements. Numb et son riff poussé inexorablement en guise de longue intro, jusqu’au coup de turbo stoner speedé génial. Point. Line. Plane., Looters et leurs gros riff ventrus se mariant avec des arpèges grinçants, dans une conception toute neurasthénique de la mélodie, bien propre au noise-rock.

C’est d’ailleurs une constance chez Tuco, cet alliage de puissance et de passages atmosphériques. Mais attention : ici, le muscle reste bandé. Pas de tentation post-hardcore blafarde, ni de chute dans le doom cafardeux. Et, dieu merci, Tuco n’est pas un groupe instrumental de plus. Même dans The Beef patrol, une voix finit par se frayer un chemin entre les rouages de la machine, une voix exaspérée, semblant lutter avec le manque d’air, qui donne à la musique du groupe comme un air de parenté avec Pord. Autres tailleurs de pierre avec les dents mais situés côté français, dans les Cévennes.

Bref, en un mot comme en cent, Tuco frappait avec ce premier EP un putain de grand coup. Et c’est donc avec un plaisir non-feint qu’on voit le groupe reprendre du service et encore plus préparer un nouveau disque, prévu quelque part courant 2017.

 

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Nevraska : l’art du bruit

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Ça pourra paraître sûrement un peu niais de commencer comme ça, mais peu importe : faire l’interview de Nevraska est un vrai bonheur. Parce que les deux musiciens sont aussi accessibles et passionnés que leur musique urgente et sincère le laisse supposer, d’abord. Ensuite, parce qu’eux-mêmes parlent du bonheur de cette nouvelle aventure sonique. Leur concert au Brin de Zinc à Barberaz a été l’occasion de les questionner sur la génèse de leur premier album, Grave Romance.

Sur votre site vous évoquez un peu votre façon d’écrire et vous dîtes que vous avez jeté autant que construit. Comment ça marche l’écriture chez vous ?

Pascal : Quand on dit « jeter », c’est tout le parcours qu’on a eu, déjà. Avant d’arriver à Nevraska, j’ai monté trois ou quatre groupes. J’ai essayé des styles, j’ai essayé des mecs. Quand on dit « jeter », c’est que ça marchait pas. On n’avait pas le feeling. Il y a des choses qu’on a gardées en nous pour Nevraska et il y a des choses qu’on a jetées parce qu’on a vu que ça marchait pas. C’est ça qu’on appelle « jeter ».

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Pascal, Nevraska (© Elsa Dumoulin)

Et le centre du truc pour Nevraska, c’est que le feeling est là. Donc je propose un riff, je le fait écouter à Cyril, tout de suite on tapote dessus, on essaye. Si ça nous convient tout de suite, on approfondit. Si on ressent pas quelque chose de suffisant, on essaye de le faire évoluer. Et on a quelques riffs, on avait senti un truc mais finalement c’était pas suffisant.

Et à chaque fois que j’amène un truc, il faut que tous les deux on ressente exactement la même chose. Si on ressent ça, c’est qu’on se fait mutuellement confiance et que ça va être bien. Et on garde.

Il y a un morceau qui m’a particulièrement frappé sur votre disque, c’est « Kollapse ». Trois petites notes que vous faîtes évoluer, avec un roulement de caisse claire assez épique à un moment. Comment s’est écrit ce morceau-là ?

P : Moi j’avais en tête un truc un peu à la Botch, voire à la Breach, pour ce morceau. Peut-être que ça n’a rien à voir mais c’était cet environnement dissonnant… D’ailleurs, entre nous on l’a appelé « Breach » pendant longtemps…

Cyril : C’est pour ça qu’on l’a appelé « Kollapse » avec l’orthographe suédoise !

P : Et donc à chaque fois, c’est la même chose : on improvise sur le riff, on essaye de voir si on ressent la même chose et puis on agrémente . C’est pour ça que tout de suite derrière, il y a un espèce de blast. On s’est dit « ça va être drôle, ça ». Et c’est marrant parce que ce morceau divise les gens : c’est carrément pour ou carrément contre. Certains le trouvent monstrueux et d’autres disent que c’est celui qu’ils aiment le moins.
C : Il y a le petit riff qui groove. Serge Moratel nous avait dit : ça fait très Chicago.

C : C’est d’ailleurs le seul morceau qu’on a joué sans clic. Sur celui-là, le métronome empêchait le feeling de sortir.

P : Avec un peu de bouteille, on se dit que c’est bien d’essayer d’étirer les riffs pour bien qu’on soit dedans. C’est le travail qu’on essaye de faire : d’étirer…

C : D’exploiter au maximum…

P : Ouais, d’exploiter un autre rythme, une autre note qui va avec le riff ou qui va en amener d’autres. Et puis le but c’est de bosser à la sensation, au ressenti, donc effectivement on fait tourner. On essaye de voir ce qu’on ressent.

C : Le plus simple, pour un musicien, c’est d’enchaîner des trucs. Le plus dur c’est d’exploiter un riff et d’en faire quelque chose. La plupart des grands morceaux sont basés sur un riff et puis un bridge et puis voilà. En tous cas, exploiter un riff et arriver à en faire quelque chose qui se développe, c’est balèze. C’est certainement plus complexe que de fonctionner avec des méthodes et des chapitres, des plans.

P : Il y a des groupes qui le font très bien. Mais moi, mon gros problème depuis toujours – enfin, là, ça va mieux – c’est ça : j’ai un riff, j’ai un riff, j’ai un riff… Dans tous les groupes, c’était ça. On a plein de riffs. Putain, on en a trop ! Mais on a quand même une sensation de pas assez ! Et là tu te dis : on a mille riffs et on a une sensation de pas assez ! C’est juste fou !

C : Et ça, en fait, c’est le fait de rentrer dans un concept musical qui t’empêche de faire autrement. Ah non, on peut pas faire groover un truc parce que ça va pas faire métal !

P : Et nous comme on n’en a rien à foutre ben, du coup, on s’en fout ! Et même ça nous fait rire de mettre le blast alors qu’on partait sur truc hyper lent et ensuite sur un truc groovy pour filles qu’apparemment certains n’aiment pas.

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Cyril (© Elsa Dumoulin)

Et donc, j’imagine que ça ne vous arrive jamais d’avoir une idée et de vous dire « Ah non, ça, c’est pas pour Nevraska ».

P : Surtout pas ! Nevraska, c’est quoi ? On le dit depuis le début, Nevraska, c’est rien, on n’en a rien à foutre, on fait ce qu’on veut. Comme c’est rien, faisons tout !

C : Il peut y avoir des problèmes d’approche. On peut se dire « Ah, ça, on connaît pas. On a jamais exploité ce genre de choses. » Mais le but, c’est de se libérer.

P : Et ce qui nous fait plaisir, c’est qu’en live, comme en album maintenant, on a ce même retour les gens nous disent « On se fait jamais chier, zique après zique. Il y a tout le temps un petit truc différent. » J’ai eu deux ou trois retours personnels où les mecs me disent « Généralement, sur un album on zappe deux ou trois morceaux et surtout sur un album de potes où c’est plus petit niveau, et là, on écoute de A à Z. » On est contents. C’est ça qu’on veut pas perdre. Demain, on peut faire un truc hyper lent ou bourrin. Un groupe, c’est l’empreinte que tu donnes. Ça serait complètement fou de se dire on fait tel ou tel style, surtout à notre niveau…

Votre album s’intitule Grave Romance, d’où vient ce nom ? Il évoque un univers un peu folk…

C : Grave romance, c’est des histoires anglaises sur des thèmes presque macabres, je dirais. Plusieurs personnes sensibles nous ont dit qu’on avait l’impression d’écouter une histoire avec des passages qu’on pourrait interpréter comme une rencontre, un accident, etc. Il n’y a pas vraiment de chant qui explique tout ça donc c’est juste de la musique, une image. Mais c’est pas dans un sens sucré ou hyper positif : on fait pas de la musique populaire ou très gaie. Mise à part « Kollapse » peut-être un peu ! (Rires)

P : Moi dans « Grave romance », j’aime le mineur/majeur. C’est beau, puis c’est triste, puis c’est beau et triste et puis tu sais plus. J’aime tous ces groupes qui font ça. Genre Microfilm. J’ai adoré ce groupe parce qu’ils ont des riffs et des thèmes et des harmonies… T’as envie de pleurer et puis t’as envie de rire à la fois. Je trouve ça très beau.

Je pense que c’est peut-être un truc de notre génération, qui s’est beaucoup développé avec l’émo, le hardcore à tendance émotionnelle…

C : Ouais, Neurosis.

P : Et puis le screamo. Moi c’est pour ça que j’ai beaucoup aimé le screamo à une époque. Il y avait des trucs très beaux et ça pouvait être bourrin en même temps.

Pour en revenir au groupe, comment le fait d’être deux influence votre musique, voire votre façon d’être sur scène ?

P : C’est deux choses différentes. Niveau musique, être deux, ça simplifie. Et encore, on n’est que deux mais parfois on passe des heures à dire non…, mais si…, mais je crois que…, mais non…, etc.

Et puis, être deux ça vous laisse plus d’espace à chacun, aussi…

C : C’est peut-être plus simple en termes de décision mais par contre ça demande beaucoup plus de travail. Moi sur mon instrument je développe plus qu’avant, j’ai les samples à gérer, un peu de chant – chose que je n’avais jamais faite auparavant. Ça demande du boulot et niveau mise-en-place, concentration, c’est pas tout de suite que tu deviens à l’aise.

P : C’était pas le but qu’on commence à deux et c’est vrai que c’est à double tranchant : il y a un espace qui se libère mais faut le compléter. Avec un jeu plus fourni, des pédales, des samples. Donc ça se réfléchit encore plus.

C : T’as plus ton guitariste pour te dire « Je vais te faire ces petits sons, là ». C’est à toi de les trouver…

P : Ou, tout simplement, t’as plus ton guitariste qui te fait un truc et tu te dis « Ah ben voilà, ça sonne »

Plusieurs chroniques que j’ai pu lire parlent du dialogue très dynamique entre vos deux instruments…

P : Ça se fait naturellement…
C : Enfin, ça s’est pas fait en une semaine, hein ! Il a fallu presque un an avant qu’on ait cette complicité. On avait jamais joué ensemble avant, mine de rien ! On commence à avoir un bagage mais Il a quand même fallu un temps d’adaptation…
P : Et en plus on est parti sur une base très simple, saine : on s’amuse et on verra bien ce que ça donne. Et, petit à petit, on s’est dit « Ah, c’est plutôt pas mal ! »

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(© Elsa Dumoulin)

Et par rapport à votre son, quelle idées vous aviez ?

P : Je te pose une question : est-ce que, en écoutant l’album, tu ressens les lives ?

… Ouais je retrouve quelque chose…

On a travaillé à mort avec Serge Morattel mais l’idée c’était vraiment de retranscrire ce qu’on fait en live. Amélioré bien sûr, mais je voulais pas qu’il y ait un différence où ça fait waouh et en live : bof. Au début , « Tomoe Gozen » et d’autres, je les faisais sans disto, en vrai basse-batterie, et puis après il faut enrichir alors le naturel revient au galop donc tu te dis on va y mettre un coup de pêche, un coup de disto…
Et j’ai fait évoluer mes pédales en même temps que le groupe évoluait. J’ai jamais été trop pédale en tant que bassistes et puis là je me suis éclaté. Je réfléchissais. Je me suis dit je vais peut-être faire deux réseaux, gratte et basse, pour amener plus… Donc le son s’est fait comme ça, en même temps que l’évolution du groupe, pendant un an et demi…

C : Arrivés chez Serge Moratel, ça a été un sale cirque. Ils ont revu pleins de choses…

P : Même si tu veux ressortir la même chose en répète et en live, ça sortira différent au final. Du coup, il faut « tricher » pour s’efforcer d’avoir le même rendu en studio. Ça n’a pas été facile.
Sur certains trucs ça sortait pas du tout comme je voulais, il y avait une espèce de latence dégueu, très différente du jeu en live. Ça le faisait pas, comment on peut faire ?

C : L’ingé-son doit rentrer dans son monde à lui, se mettre à sa place, avec son matériel. C’est pas évident, je voyais bien qu’on lui posait problème parfois. C’est parfois très long pour faire un son.

Et là, vous n’êtes pas restés longtemps, en plus ?

C : Non, on était pris par le temps ; on est restés une semaine en studio. On a du prolonger de 3 jours, en coupant la poire en deux avec Serge Moratel.
P : On avait 8 jours et on avait commencé par faire des re-amp de basse. On s’est rendu compte que ce n’est pas ce qu’il fallait.

On s’est mis d’accord, et j’y suis retourné pour tout redoubler et là on a pris tout un week-end à se demander ce qu’on voulait pour chaque partie de chaque morceau, quel ressenti on veut lui donner, et là ça a pris tournure, d’autant qu’on mettait encore d’autres effets lors des prises. On a retravaillé chaque passage.

Il a été disponible et le travail était intense

C : Il était content, je pense, mais il s’est un peu tiré les cheveux. C’était une découverte un peu pour chacun et le temps prévu initialement n’était pas suffisant pour ce projet.
P : On avait fait « Nébula » et « Lirü » dans un état de grâce, enregistré en 20 minutes et mixé en une journée. Mais ce rythme-là, c’était impossible à tenir sur un album.
C : Serge Moratel a dit qu’avec le recul, il était impressionné. Il a posté sur facebook spontanément pour présenter Nevraska, ce qui n’est pas son habitude.
P : C’est un amoureux de la musique, il sort pas un truc qu’il n’aime pas de son studio.

C : On a trop bien fait d’aller le voir !

Est-ce qu’il y a un titre dont vous êtes particulièrement fiers sur cet album ? Ou que vous aimez particulièrement ?

P : Fier, non, mais pour moi, celui qui qui rassemble tout, c’est « Reason to claim ».
C : J’adore « Runaway », il est un peu à part… Il est simple et il a quelque chose de pétillant et qui passe bien.

Sur « Alkaline », il y a un plan qui fait presque electro, avec la batterie linéaire, ça ressort carrément.

P : Ben là, pareil, on s’est dit : on aime bien le dub, on va se faire une ambiance dub à la Nevraska !
P : Et lui, il (Serge Moratel NDLR) a agrémenté avec un ampli qui apportait un grésillement en arrière-plan derrière la disto, il nous a dit « Bon les gars, vous faîtes quand même du noise, hein ! On laisse ! ».

Par rapport à la pochette du disque, est-ce que l’aspect visuel est important pour vous ?

P : On avait très peu de temps, c’est ma copine qui a fait le premier jet et je l’ai terminé. On était étonnés par la côté végétal.
C : On sort du stéréotype du groupe math-rock – quoique la tendance au végétal gagne un peu mais c’est pas fait exprès. J’ai trouvé sympa la coupure qui suit les lignes du logo, juste ce qu’il faut. On s’est un peu pris la tête pour la couleur…
P : Faite rapidement, mais je la trouve magnétique et c’est le plus important.
C : Une pochette qui donne pas envie laisse présager la même chose pour la musique.
P : Une pochette exprime un ressenti du groupe, comme la zique en fait. Enfin, je crois….

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(© Elsa Dumoulin)

Quelles sont les esthétiques auxquelles vous êtes sensibles ? Quelles sont les pochettes ou les groupes dont l’esthétique vous ont marqués.

C : Les pochettes de Converge, par exemple, très expressives. Il y a vraiment un travail artistique, c’est pensé… Après, parfois les pochettes toutes bêtes font de l’effet aussi.
P : Moi, je serais plus attiré par le côté minimaliste.
C : Je pense qu’il faut essayer de s’amuser avec tout, faire des pochettes qui n’ont rien à voir avec les anciennes ou les prochaines. C’est bien le changement, je change constamment les breaks de batterie. Je m’ennuie, sinon.

Qu’est-ce qu’on peut attendre de vous à l’avenir, en termes de projets et en termes musicaux ?

P : On va défendre l’album, déjà, on a déjà quelques dates pour le début d’année sur Walk the line. Et d’autres salles cool à venir…
C : On espère qu’avec l’album il va se passer quelque chose… On est preneur de pouvoir tourner plus…
P : Clairement, on manque de temps pour démarcher autant qu’on le voudrait…

P : Musicalement, ben, on a plein d’idées…
C : On cherche un peu à sortir de l’album…
P : Là, on a fait un morceau qui n’a rien à voir…. On va la faire ce soir, histoire de voir un peu ce que ça donne. Elle est un peu spéciale. Pour moi, c’est limite du Pink-Floyd math-rock (Rires) !

C’est toi qui t’occupe des samples, Cyril ?

C : J’essaie de m’adapter techniquement, et de m’y mettre un peu pour créer, mais Pascal est plus avancé que moi.
P : Cyril a amené l’idée des chants bulgares dans « Nemesis »…
C : J’ai mis des heures à faire ce qu’un mec qui sait ferait en deux minutes mais bon c’est comme ça que tu apprends…
P : Le morceau initial avait un riff jazz au milieu et l’ensemble ne marchait pas, ça a fini par donner au final deux des titres de l’album « Dux Bellorum » et « Nemesis ».
P : Au final elles ont chacun leur identité.
C : « Dux Bellorum », C’est une entrée en scène. C’est comme un souffle qui avance, progressivement.

Comme vous êtes un groupe très actuel, j’avais envie de vous demander trois groupes ou musiciens qui représentent pour vous le rock d’aujourd’hui et que vous nous conseilleriez ?

P : Moi je trouve ça très bien de faire des choses comme ça , j’aimerais qu’il y ait bien plus de groupes qui partagent leurs goûts. Comme tu nous avais dit « rock » et « actuel »…
C : Ah merde, y’avait « rock » et « actuel » ?
P : …et ben :
- Electric electric Sad Cities Handclappers, c’est ce qui m’a fait chavirer dans le Math-rock
- Mouse on the Keys : un groupe japonais qui te font du math-rock piano batterie. Je m’en suis jamais remis…
- Lite : Phantasia
Après, il y en a plein d’autres : Doppler…
C : Moins math rock : Candiria Beyond reasonnable doubt – le batteur a été une grosse influence. Converge…. Eighties Matchbox B-line Disaster : le premier album est énorme. Simple, direct mais il fallait le faire. Et puis, si je vis vieux, je pense que « It’s me god », de Breach, restera toujours près de moi…

« Torrents d’amour soniques » (Black Mont-Blanc, Noyades, Satan – Le Poulpe, 6 janv.)

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Trois groupes au Poulpe, c’était presque un mini festival !

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Et trois groupes bruyants, en plus. C’est Black Mont-Blanc qui a ouvert le bal, bien qu’on était un peu trop serrés – mais c’est qu’il y a du monde – pour danser. Black Mont-Blanc, c’est un nouveau groupe – c’était leur premier concert – où, en plus du guitariste chanteur, l’on retrouve deux membres de We are the incredible noise, si je ne me trompe pas. Incredible noise qui répète également au Poulpe. Parce que le Poulpe, en plus d’organiser de bons concerts, sont aussi une pépinière de groupes. S’il-vous-plaît.

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Trio, donc. C’est beau les trios. C’est pur. Surtout quand ça envoie du noise-rock furibard, tendu. Breaks nerveux, cassures, voix qui s’étrangle en arrière-fond du torrent de bruit.

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Quelques morceaux plus planants aussi, où le groupe se laisse aller à des arpèges méditatifs. Belle entrée en matière, pas de doute, et qui donne grandement envie d’en voir et d’en écouter plus. Voilà un groupe qui devrait aller taquiner les Worst in me et autres Tuco de l’autre côté de la frontière.

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Noyades

La salle s’est remplie encore un peu plus, si c’était possible, pour Noyades. Ce trio lyonnais vient de sortir son premier album et enchaine les weekends de concerts dans une tournée en pointillés.

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La musique de Noyades est une sorte de croisement entre noise-rock (grosse basse) et musique psyché (cavalcades effrénées, portes de la perception traversées depuis belle lurette).

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Le tourbillonnement sonique entêtant fait son effet étourdissant, mais mes oreilles formatées au post-hardcore ne peuvent pas s’empêcher d’être génées par le côté très linéaire de cette musique, qui me semble désuet. J’essaye mais j’arrive pas vraiment à m’y faire.

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Satan viennent tout droit de Grenoble et ont asséné un set totalement furieux et totalement jouissif. Rafales de blasts incessantes. Grind-punk bloqué sur l’ultra-violence.

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Le chanteur de ce magnifique groupe portait un tee-shirt de Danzig et, à bien y réfléchir, leur « musique » a un petit côté rock ‘n roll, un petit côté horror-punk. Mais petit.

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All hail Satan !

Pour les adorateurs du malin et les amateurs de bruit vomi que nous sommes, par contre, c’était 100% de bonheur.

« Punk porn » (Tuco, Orso, Cocaine piss – Undertown,16 déc.)

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Ouh la la la, mais c’est que Drone to the Bone nous proposait ce soir-là un petit concert avec trois groupes variés comme on aime, avec en plus une pincée de folie noise plus qu’aguichante. Hop hop hop, on se presse à l’Undertown, très chouette salle située près de l’aéroport de Genève, malgré le brouillard à couper au couteau.

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Le son net et précis servait de belle manière le hardcore massif de Tuco, bloqué sur un tempo lourd, piéton et poisseux,

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Alternance de voix, cassée, hurlée, au bord de l’apoplexie (j’adore utiliser ce mot mais, en vérité, je suis pas sûr qu’il soit médicalement très approprié) pour Laurent, le bassiste, plus tendues et sombres pour les deux autres.

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Tuco, c’est de la belle mécanique, lourde, massive et cependant bien huilée , réagissant au quart de tour. Un disque, album ou autre, devrait voir le jour quelque part en 2017 et il est attendu de pied ferme.

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Avec Orso, la cavalerie est de sortie. C’est pas moins de 3 guitaristes qui s’alignent sur scène en plus du bassiste. Pas de chant, par contre. On sent bien chez ce groupe la volonté de faire une musique différente, bâtie sur autre chose que l’inusable couplet-refrain, en un mot quelque-chose de « post ». Et cette musique à la fois puissante et planante propose ses moments intéressants, dans lesquels l’instrument qui ressort le plus est finalement la batterie et ses variations.

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Mais par contre, elle est si est si monobloc, si monocorde et linéaire, qu’elle peine quand même à susciter l’émotion. Chez moi, en tous cas. Coup dans l’eau. Ou alors il y a quelque chose que je n’ai pas compris, ce qui est tout à fait possible.

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Cocaine piss arrive de Belgique avec une jolie réputation d’un des groupes les plus dingues du moment sur scène. Et, de fait, il se sera passé pas mal de trucs fous pendant leur concert court mais intense. Entre le punk en roller qui déboule tout-à-coup la scène sans crier gare pour sauter par dessus les retours et le gars qui débitait ses cours de russes au micro, ça n’a pas manqué de rebondissements.

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Mais le plus taré de tout, c’était certainement la musique du groupe. Punk-hardcore speed estampillé années 80*, traversé de drôles de soubresauts noise, sur laquelle la voix de la chanteuse rajoute une bonne couche de folie**. Une bonne fée punk a dû se pencher sur le berceau de ce groupe parce que la première fois qu’on l’entend cette voix a tendance à hérisser le poil et puis, au final, faut bien avouer que ça fonctionne à mort.

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D’autant plus que la chanteuse incarne cette folie, passant un bon moment du concert dans le public ou à terre. Les (assez nombreux) photographes et cameramen présents ne s’y trompaient pas, qui suivaient le moindre de ses mouvemens pour saisir un instant de « punk porn » (2.0). C’était un peu étrange, mais faut dire que ce groupe a quand même tout ce qu’il faut pour faire la prochaine couverture de Maximum rock’nroll (si c’est pas déjà fait, d’ailleurs ?!?) Et quoi qu’il en soit que ça fait du bien de voir un groupe pour lequel un concert c’est un peu plus qu’une pure performance musicale. RRAAAAAAAAAAAAHHHH GGGGGGGRRRRRRRRRRR PUUUNNKK YYEESSSSSSSSSSS !!!!

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*Un peu à la manière de Youth avoiders, excellent groupe vu il y a peu à la Makhno.

**De manière vraiment similaire à The Sloks, excellent groupe vu récemment à Annecy. C’est marrant les coincidences.

Nevraska, sous haute tension

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Grave romance (Gabu asso, Urgence records, En veux-tu? En v’là !)

Les choses dans l’ordre. Après une première démo déjà bien aguichante, le duo basse/batterie annecien Nevraska a poncé, poli ses morceaux lors de tournées à répétition et sur le moindre bout de scène locale qui lui est tombée sous la main. Jusqu’à les graver, tout beaux, tout chauds, sur les sillons d’un vinyle, produit par le groupe et une poignée de petits labels indépendants.

10 titres qui font bloc, trempés dans le même bouillon d’un noise-rock émotionnel et urgent. Enregistrés au Rec studio de Serge Morattel, garant d’un son ferrailleux et d’une ampleur titanesque. Riffs sous haute tension, qui tournoient et se chargent d’électrons jusqu’à l’implosion. Mathy noise-rock, comme disent les américains. Ou noisy math-rock. Dans les parages sombres et haletants de Doppler. Pour situer.

Mais Nevraska, c’est bien plus qu’une simple histoire d’étiquette ou d’influences. Comme il le dit lui-même, le duo ne ferme la porte à aucune source d’inspiration. L’ouverture de l’album, Dux Bellorum, rappelle que les deux musiciens officiaient plutôt dans des combos post-hardcore. Malta s’autorise un groove presque fusion et le break d’Alkaline pourrait rappeler une ligne d’électro, avant qu’il ne s’enflamme dans un gros riff noise – quelle classe, ce genre de morceau, où un groupe sait habilement fondre un riff typé dans sa musique, qui fait son effet presque à l’insu de l’auditeur. Le duo distille les ambiances, appuyé par des samples assez présents sans pour autant être envahissants, jouant parfois le rôle du chant (magnifique Liru) ou osant des contrastes qui rappellent les expérimentations de Human side, le groupe précédent de Pascal. Nemesis et ses choeurs. Les petites notes désolées de Tomoe Gozen, posées délicatement sur une succession de riffs survoltés… Une musique mature, qui ne joue dans aucune chapelle. Et c’est bien dommage, ça aurait de la gueule.

Impossible ici de regretter l’absence d’une quelconque six-cordes – mais qui oserait ? Les deux instruments mènent un dialogue serré. Basse qui fait feu de tout bois, maniant autant le riff frontal et compact, le coup de butoir que les tensions mélodiques, lorsque ce ne sont pas les variations d’une batterie particulièrement inspirée qui prennent le dessus. Le duo s’autorise à peine à ralentir le rythme sur Kollapse, qui, curieusement, est un des morceaux les plus marquants, sur l’album comme en concert. Trois petites notes tristounettes prenant peu à peu de la vigueur, jusqu’à vibrer d’énergie et même – mais oui, mais oui – de joie, puis disparaissant sur une descente de piano, fondu au noir de grande classe pour un morceau atypique et attachant.

Enveloppés dans une pochette au premier abord un peu froide, mais finalement cohérente avec l’esthétique sobre, toute en clair-obscurs, que le groupe s’est choisie, ce premier album est donc bourré jusqu’à la gueule de morceaux qui respirent l’expérience mais aussi la fraîcheur des premières fois. Pas mal pour un groupe qui avait commencé comme une ultime tentative de deux « ex » un peu désabusés. Sacré coup, même.

https://nevraska.bandcamp.com/

Farrokh Bulsara, Intercostal, Agonir, Mort mort mort (La Makhno, 8 mai)

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Hey, quelques images du concert de dimanche soir à la Makhno…

DSCN1381Les tchèques de Farrock Bulsara ont joué en premier. Emo-hardcore bien foutu, sans surprise mais qui sonnait bien, même la voix.

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DSCN1391.JPGIntercostal joue du stoner. Mais pas du stoner aérien, plutôt la version les deux pieds dans le ciment. Des morceaux épiques, des méandres de riffs, le son épais et martial.

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Tu croyais avoir touché le fond. Eh ben… Agonir signifie abreuver quelqu’un d’injures (c’était marqué sur l’affiche) et il se pourrait bien que ce soit ce qu’ils aient fait. Crustcore violent, avec 2 voix masculine et féminine et le bassiste d’Intercostal à la guitare. Dans les règles de l’art. Avec tout ce qu’il faut de grind et de dis-beat. Peace, ha ha.

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Mort mort mort avaient déjà joué à Annecy en 2014. Ils avaient l’air un peu crevés et pourtant leur post-hardcore lourd et atmosphérique était bien prenant. Il a quelque chose de Neurosis. Il y a même un petite ressemblance physique pour le bassiste… On sent l’expérience de ce groupe de Caen qui doit jouer et tourner depuis environ une dizaine d’années et dont les membres sont issus d’autres formations hardcore marquantes.

 

Worst in me, « A long way home » (Bad mood records/Inhumano/Don’t trust the hype/Ashes cult)

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« A long way home » est le premier EP du quintet Worst in me, basé à Genève. La version vinyle est sortie conjointement sur plusieurs labels tandis qu’une version cassette en édition limitée était éditée par Ashes cult, micro label récent dont Xavier, le bassiste du groupe, est partie prenante.

« Living with decency », le morceau d’ouverture, donne le ton, avec une jolie partie hardcore rapide, un break sombre qui pourrait rappeler Neurosis et son riff metalcore final. Le style du quintet est en effet un dosage varié de différents ingrédients du hardcore depuis, disons, une vingtaine d’année et les 6 morceaux qui composent ce EP sont remarquablement homogènes.

On y trouve une forte composante mélodique et émotionnelle, comme sur « Profit on mankind » et son  mid-tempo presque pop-punk, ou dans « Citizen X » où la voix parlée me rappelle un morceau d’un des tout premiers groupe emocore (ou screamo, ou hardcore DIY, comme vous voudrez, on s’en fout) français : Finger print (1994…).

Mais le hardcore de Worst in me sait aussi être puissant ou lourd et travailler ses ambiances avec des parties lentes striées de guitares bloquées sur des notes suraigues, typiques du post-hardcore. Les mélodies et progressions d’accords ne sont pas toujours très originales… mais est-ce le but?

Quant à la voix, je ne peux pas m’empêcher de penser à Roger Miret d’Agnostic front tant certaines attaques sont proches. Ces intonations sont d’ailleurs assez répétitives et c’est un autre reproche qu’on peut faire au groupe.

En fait, si on devait résumer shématiquement ce disque, on pourrait même dire qu’il ressemble à ce qui se passerait si Agnostic front faisait de l’emo (la greffe peut sembler improbable, mais je dis ça sans moquerie aucune !)  Du hardcore intense, sincère et concerné, comme tout hardcore devrait l’être.

Worst in me, « A long way home » (Bad mood records/Inhumano/Don’t trust the hype/Ashes cult)

https://worstinme.bandcamp.com/

Interview : TUCO

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Des gros riffs qui tournent en boucle, façon Panzer division, striés parfois de fulgurances où l’atmosphère se fait changeante et les accords inattendus… Ce que j’avais entendu de Tuco m’avait bien mis les crocs. Un concert – manqué –  à Urgence disks le 25 février dernier et la petite vidéo qui allait avec n’avaient fait qu’aiguiser cette frustration. J’ai donc décidé d’envoyer quelques questions au jeune groupe suisse originaire de Duillier, histoire d’en savoir un peu plus…

Vous avez enregistré un EP en 2009/2010. Qu’est-ce qui s’est passé pour vous depuis ?

Laurent (basse, voix) : Ouais, ça fait un peu groupe de branlos tout ça… En fait, le timing n’aurait pas pu être beaucoup plus mauvais que ça. On l’a enregistré en août 2009, et je partais voyager avec ma copine pour 9 mois en septembre. Quand je suis rentré de voyage, Michel (guitare) décidait de partir pour travailler à Zürich, où il est resté 3 ans environ. Bon, lui n’a pas chômé là-bas, car il a vite rejoint Gletscher (post-rock), où cette fois il jouait de la batterie. Quand il est revenu, on s’est tout de suite dit qu’on allait reprendre Tuco, mais cette fois-ci c’était Patoche, notre batteur à l’époque de l’enregistrement, qui n’était plus de la partie, maintenant il fait bouger des culs dans Lord Makumba, un groupe d’afro-beat basé sur Genève. Du coup, on a demandé à Seb (batterie) de nous rejoindre. On le connaît depuis toujours et il venait de quitter Mumakil pour des raisons de problèmes récurrents au poignet. Ça a pris un peu de temps pour qu’il puisse se remettre à jouer normalement, mais maintentant ça roule nickel. Du coup, on s’est remis à composer et à répéter régulièrement, et on espère que ça va continuer comme ça!

Tuco, c’est le personnage d’une série, je crois. Pouvez-vous nous en dire un plus sur le choix de ce nom et cette inspiration ?

Laurent : Ah ouais, c’est le narcotrafiquant dans Breaking Bad. En fait, quand on a commencé la série n’existait pas encore. Tuco, c’est plutôt un double hommage: premièrement, c’est le personnage « The Ugly » (le truand) dans le film de Sergio Leone, on s’est dit que ce bandit mexicain dégueulasse, ça correspondait assez bien avec notre musique. Ensuite, c’est un hommage au groupe Keelhaul qui nous a beaucoup influencés, où Tuco est le nom de la première track de leur premier album.

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Pour vous, cette musique, c’est juste de la musique ou y a-t-il également un esprit et des idées ?

Laurent : Bon c’est clair que c’est la musique qui importe le plus. En fait, au début on avait commencé en groupe instrumental avant qu’on ne se rende compte qu’il manquait quelque chose, la voix. Je me suis fait désigner volontaire et dans la composition on pense à la voix en termes de « Ah ouais, ce serait bien d’ajouter du chant sur cette partie bourrine », sans aller beaucoup plus dans les détails. Pour revenir aux idées, nous n’avons jamais pensé à Tuco comme un vecteur pour promouvoir des idées. Par contre, il est à mon avis impossible de ne rien laisser transparaître de ce qu’on pense ou ressent, et quelque part cela se retrouve dans notre musique. En fait, on ne cherche ni à cacher ni mettre en avant certains aspects de nos personnalités. Ce que l’on recherche, c’est créer des émotions quelles qu’elles soient chez nos auditeurs. Tuco est un espace où chacun d’entre nous peut se laisser aller, ce qui la plupart du temps signifie raconter des blagues moisies entre les morceaux.

Le visuel de votre EP fait un peu penser à l’esthétique communiste ? Qui l’a réalisé ?

Laurent : Ah ouais, merci, en fait je ne l’avais jamais vu comme ça. C’est Manon Roland (http://www.manonroland.ch/), une copine illustratrice qui l’a fait. Elle est super talentueuse et fait plein de trucs : illustrations, graphisme, animations. On lui a donné carte blanche, on voulait juste que celà représente le côté brut, sans fioritures de notre musique. On a été super contents du résultat. Je vais lui dire, cela lui fera plaisir.

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Et en passant, que pensez-vous de l’idée du communisme ? Etes-vous à l’aise dans la société, disons, libérale et matérialiste dans laquelle nous vivons ?

Laurent : Alors l’idée du communisme est bonne, mais se base sur une conception assez optimiste de l’être humain où tout un chacun réalise que le bien commun s’aligne avec le bien individuel. Je ne pense pas que l’humain ait atteint un tel niveau de développement, à mon avis les intérêts personnels primeront toujours sur le bien commun, même si le système global en pâtit. Comme tu le vois, je ne suis guère optimiste, mais c’est mon avis personnel. Après, au niveau de la mise en application du communisme, le tableau est absolument accablant, avec des privations de libertés inacceptables. Si tu regardes maintenant, la plupart des pays qui ont un régime officiellement communiste au pouvoir pratiquent le libéralisme économique, et ne gardent que le régime totalitaire en tant qu’état-flic (je pense notamment à des pays comme la Chine ou le Vietnam, dont je suis originaire).

Après, je ne suis pas fan de la société ultra-libérale dans laquelle nous vivons. Lire que les 60 plus riches possèdent autant que la moitié de la population la plus pauvre fout clairement les boules. Après, on se rend compte du bol immense d’avoir grandi en Suisse, où la liberté de penser et de s’exprimer est généralement garantie, où on bénéficie d’une éducation de qualité et des perspectives personnelles et professionnelles. Dans ce contexte, je me vois mal cracher dans la soupe, même si nos privilèges ont un coût pour le reste de la planète. À la fin, la chance que nous avons de vivre dans cette société est que nous pouvons faire des choix, ce qui au niveau global est un luxe.

Comment s’est passé votre concert à Urgence disks ? Avez-vous apprécié de jouer dans ce lieu ?

Laurent : Alors oui c’était super. Damien d’Urgence Disk a été hyper-classe : nous a invités, nous a fait la promo, nous a nourris, nous a filé des bières, nous a filmés et nous a encore donnés l’argent des entrées.

Quels sont vos projets ?

Laurent : Dans l’immédiat, notre but est de donner le plus de concerts possible et de continuer à progresser et composer. D’ici la fin de l’année, on aimerait bien enregistrer les nouvelles compositions (EP ou LP, à voir).

Merci beaucoup ! Voulez-vous rajouter quelque chose ? Une petite blague ? Un message qui vous tient à coeur ?

On ne dira qu’une chose : Le général est arrivé à pied par la Chine mais Superman a une bouille incroyable.

https://tuco12666.bandcamp.com/releases