Romain Frélier-Borda est un garçon bien occupé. Romain Frélier-Borda joue dans tout un tas de groupes ou de projets dont on reparlera dès que possible. Mais avant ça, il y a longtemps, Romain a joué, un peu de tout, dans un projet éphémère nommé Post. Et ce projet-là t’écharpe méchamment les oreilles. Basse massive et distordue, batterie appuyant ses coups, voix monocorde et hargneuse. Ambiance dansante et désespérée, dub crâmé, relents de Public image limited qui traînent. Quatre titres qui ne font pas rire du tout pour un EP qui n’existe qu’en format numérique et qui s’écoute immédiatement ici.
Cutter est né dans le garage de JB (ex-Prejudice GVA) sous le nom Kill all the goats, avec Pascal à la batterie et Tom à la guitare/voix. Le premier concert s’est fait dans le chalet d’un copain qui fêtait l’obtention de sa nationalité française et le dernier au Bistro des Tilleuls avec le groupe russe Jars. A l’époque du premier concert, c’est déjà Chloé qui avait repris la basse et le groupe s’appelait Catalgine, en référence à un morceau de Carther-Matha, groupe qui appartient à la préhistoire du hardcore DIY en France. C’est également avec Chloé que Catalagine enregistre sa démo/EP « 5500 slippery goats », dans le sous-sol d’un copain qui s’était construit un petit studio. C’est par cette enregistrement que Julien découvre le groupe et finalement le rejoint quand Chloé lache le poste de bassiste. Le groupe change de nouveau de nom pour Cutter. La meilleur étiquette qu’il ait reçue, c’est « noise-rock 80s » – bien qu’on voit pas très bien à quoi ça peut correspondre mais sûrement un truc bien primitif. Les gens font aussi régulièrement référence à Rage against the machine pour parler du groupe. Faîtes attention à ce que vous dîtes, quand même, les gens.
Salut Andrew, Julien La Machine, Olive LowLightConditions et Smutt, Deaf Lingo, Disco-Boule, Nevraska, Flo Cosmique et son Orchidée, Nurse et la Poulpe family, Don Aman, Milkshaker, Fisted by a priest, Julien Chateau-rouge, DKDance, Sheik Anorak et Shaakalens Bror, Jars, Dewaere !
Merci aux Tanneries de Rumilly, à Greg et son Poulpe, à Swoltan, Alexandre et aux Digital natives, aux Pirates et à leur Brasserie, à ceux qui partent en Spirale et à ceux qui tisent sous les Tilleuls et à ceux qu’on oublie !
PS Bon, si jamais, Pascal cherche à monter un projet post-punk/cold/EBM, Julien est partant pour faire la basse dans ton groupe deathcore/Hardcore/Slam/etc. et Tom est au Poulpe tous les vendredis soirs…
Lorsqu’on demande quel groupe a apporté du nouveau dans la musique punk ou affiliées ces dernières années, un nom revient : Girl band. Après Idles et Viagra boys les années précédentes, le festival Antigel prouve une nouvelle fois qu’il ne tire pas à l’aveuglette.
Après une plateforme sur le lac Léman, c’est au tour de la Banque alimentaire genevoise d’être investie par Antigel. On pensera ce qu’on veut de cette pratique mais le vaste entrepôt et ses alignement de dizaines de casiers de nourriture fait un cadre atypique et intéressant au concert. Devant la petite scène montée pour l’occasion et son arche blindée de projecteurs se presse un public impatient – assez dense, mais c’est pas la folie non plus. Faut dire que faire venir le groupe de Dublin pour un unique concert faisait grimper le prix de l’entrée à un niveau pas forcément accessible à tous.
Les quatre membres de Girl band montent sur scène et lancent la machine sans autre forme de procès, plongeant immédiatement le public dans un univers de tiraillements, cisaillements, de grondements et tensions contraires à nul autre pareil. Seule la batterie, binaire, millimétrique, aux accents dansants parfois directement empruntés à la techno, constitue un repère vraiment stable. La guitare entretient une relation très compliquée avec l’idée de mélodie. Fracas, gerbes, étincelles, vrombissement seraient des mots plus adéquats pour qualifier le jeu sidérurgique d’Alan Duggan, véritable artiste de la pédale d’effet. La basse est aussi en proie à des déraillements permanents aux forts relents no-wave. La gorge serrée, le pétage de plombs au bord des lèvres, Dara Kiely scande ce chaos organisé de ses jérémiades lancinantes, ses imprécations de prédicateur à bout de nerfs.
Témoin ébahi de cette mécanique partie en vrille, on ne peut que reconnaître qu’on est tout simplement face à des génies de la noise. Mais bizarrement, par moment, l’ennui n’est pas très loin non plus. La tension est uniformément haute, des passages planants, parfois sans batterie et où Dara Kiely s’essaie à chanter, font retomber la pression plus qu’ils ne la modulent. La mécanique de Girl band est faite pour crisser violemment. Le concert ne donne pas l’impression de décoller totalement. Le contact avec le public est assez minimal et Girl band quitte la scène sans cérémonie. Ovnis de la noise, à prendre ou à laisser.
Toutes les photos sont de Amdo, merci à toi. (On peut en voir d’autres sur la version Rictus de l’article.)
Muscovite noise-rockers Jars stopped in our area last November and we had the coolest time. The show was a total blast in a packed Bistro des Tilleuls and in front of an audience gone wild. This interview was done after the gig with Anton (guitar, voice), Pavel (bass) and Sasha (drums).
You are in the middle – or, rather three-quarters, – of the tour, how has it been going so far ?
Pavel : So far, two days off but the second day off was because of the car. We didn’t want it, we didn’t have a rest, we just fucked up with the car.
But
they managed to put up another gig for you, didn’t they ?
Sasha : Yeah, and the second gig was even better ! Much more people came and everyone enjoyed it so much ! We had a great time in Guéret !
Is
it your first European tour ?
Anton : No, I’ve been playing in Jars for 8 years, with a lot of different people,. We’ve been together for about two years. This is our first big European tour. Our first time further to the west than Germany.
S : So it’s our first time in France, in Spain, etc. all together. Definitely worth it !
Your
last record was put out by a French guy, Lionel from Pogo records.
Can you tell me the story behind it ?
A : The story is really simple. He just wrote us on Facebook and asked if he could put our record on his bandcamp. I said yes and then he helped us releasing the new one. He also helps a lot on this tour, sending info to everyone, spreading the word. Thank you, Lionel !
S : Yeah, he is a great guy.
Your
music is grounded in noise-rock but you sing in Russian, unlike many
bands who sing in English even if they’re not from this country…
A : We have some records in English – early ones. For me, it’s very important that the words I sing touch me. I need to feel what I sing. And, at some point, English stops doing it. The lyrics in Russian are a good way to go deeper… To tell yourself what you think and feel about different things.
P : I’d like to add that, on this tour, we played with different bands from different countries and when the bands sing in their native language, for some reason, it’s more interesting. Today, in the van, we listened to a band from Basque country, they sing in their language and it’s really great !
A : It makes music more diverse…
Anton,
obviously the lyrics are important for you… It’s something that
you spend time on ?
A : A lot of time…
S : After the song is ready, Anton spends several months creating the lyrics. This is how important it is to him.
A : Some of the new songs that we played tonight, the lyrics are in process. But no one can understand them. (Laughs)
Yeah,
except when you explain it between the songs just like you did
tonight when you talked to us about political events happening in
Russia… Is the political situation in Russia something that has an
influence on your music?
A :
Not the music but the lyrics, definitely. Everything comes from the
feelings inside… so maybe our music too !
It’s
quite unusual for a noise-rock band. Usually punk and hardcore bands
are more into politics…
A :
I consider us as a punk band ! And, anyway, if you walk in the
street with a guitar and somebody stops you and ask about what you
play, it’s easier to answer « I play punk. » than going
into details about noise-rock…
S : Basically, noone understand what noise-rock is. (Laughs)
So
how is it to be a punk band – or a noise-rock band – nowadays in
Moscow ?
A :
Nowadays, Moscow is a good place to do any kind of music ! We
have strong social networks, a strong scene. If you want to book a
gig, you just do it. I’ve been in the punk scene for a very long
time. I know everyone so it’s kind of easy for us.
S :
I see a lot of newcomers and a lot of great new bands. In my opinion
the scene in Russia and in Moscow in particular are on their rise.
It’s really wild !
A :
And there are people who want to listen to it, that’s very
important !
S : And when you are in this environment, it’s so inspiring that it really helps you to push yourself and rise above yourself. Actually, I think that right now Moscow is the best place in the world to create music !
A :
Yeah, one of the best place ! Ten years ago, we needed a lot of
media to do a good show. Today we still need it but it’s much
easier.
P :
I think somehow that people have changed. They are far more
interested in knowing what other guys are doing.
A :
Yeah, ten years ago, a good band was a band singing in English. You
were good if you played like Arctic monkeys. Now you’re good if you
play like Grazhdanskaya Oborona and you sing in Russian ! Now
we’re looking inside our own culture.
S :
And also there are a lot of bands from different parts of our
country, not just Moscow : Khabarovsk, Irkoutsk, Vladivostok…
A :
And the guy who drives us has played a major role in that !
Yeah,
you talked about Denis during dinner… So, let’s pay tribute
to the man ! You said he was able to drive from Portugal to
Vladivostok !
P :
Several times !
A :
He did six tours from Moscow to Vladivostok. The point of this tour
is the connection between different cities and it really works !
Now we have a lot of friends from Siberia…
S : Yeah, it makes touring way easier. Some years ago, it was almost impossible to imagine that you could tour through the whole country, right now it seems doable even if it’s difficult. It just takes a lot of time but you know almost everyone on the way, great people and great bands. So it’s easy : you quit your job and go touring ! (Laughs)
OK,
so can you educate me a little about the Russian scene ? Can you
give me some names that are important to you ?
P :
Oh, we’ve been asked that before and you’ll need to stop us
because the list is long !
A :
So let’s set up the rules : only bands that are active now,
ok ?
S :
The first band that comes to my mind is EEVA. Great band, the
guitarist was in the audience. He lives in France right now. And
also, another band : RAPE TAPE from Khabarovsk…
A :
Terrible name…
S :
It’s an absolutely insanely great band ! I think it’s one of
the best live bands in the world right now !
A : My choice is Pozori. It’s feminist electro-punk. Right now, they kind of disbanded but soon there will be a kind of reunion. I plan to play in this band. (Update : Anton is now playing bass in Pozori. -Ed.) It’s noisy, it’s angry and it’s kind of funny. It’s music that punches you in the face ! By a girl ! Fucking cool !
S :
I have to say that the music is absolutely disgusting ! You will
love it !
A : And my second choice will be C.X. They call themselves « boozecore ». It’s really slow sludge metal. They sing about literally two things : weed and vodka. They are so simple that it becomes political. Weed is restricted in Russia. Vodka is not restricted but not admired. They sing against cops – or pigs, as they say – and their message is : you don’t have to tell me what to do. I will smoke weed and drink vodka everyday !
P :
My first choice is Supergoats, two guys form a town called Kirov, one
is on drums and the other sings and play guitar and I’ll call their
music raw-power-rock. They sing about dicks, tits and fuck. On one
side, it’s very silly but on the other side it’s very raw, very
arghhhhh !
S :
It’s great fun, they are so wild ! The vocalist beats himself
in the face during the show and he beats himself really hard !
And he dances on the stage like this (pushing objects around. Ed.)
It’s really fun. I love this ! Great shows !
P :
His name is Pavel too. He is a big figure in the Kirov underground
scene !
A :
He is the Steve Albini of Kirov. Great guy !
P :
The second band is IBN. I play in this band but I mentioning it
because I only play the bass. The guy I play with is 10 years younger
than me and I absolutely love him because of his fresh and open mind
and his great ideas. As a person a bit older, it’s great to work
with a younger, high-energy guy. It’s something like noise-rock but
not as aggressive as Jars, it’s softer but… we do great shows
too !
Thanks,
I will listen to all the names that you have mentioned. There’s one
name that comes to mind and that’s Pussy riot, the one Russian band
that we have heard of in France in the recent years. So… do you
have things to say about them ?
A : I took part in one of their actions and I got punched in the face ! (Laughs) It was really strange : when they see girls who gets power, they immediately get angry. It actually took place in MacDonald’s and I was really surprised that people reacted so quickly. I like them. They do a lot of good things – apart from being now a pop band. With the money they made on tour, they launched a media called Mediazona, which writes about police brutality and human rights and I think it’s the best media I read in Russia now !
S :
Yes, it’s the most professional media in Russia today.
You mentioned bands of many different styles… What are you most interested at the moment musically ? What are you looking for when you go to a show or buy a record ? I mean : what’s your personal relationship with music at the moment ? What bores you ? What are you excited about ?
A : Actually, I like good punk-rock and noise-rock bands that don’t invent anything new. But, right now, I’m interested in improvisation stuff. Playing with rythms and time signatures rather than always the same 4/4 stuff. I like that, I like noise, I like what Death grips does. Pretty ununderstandable music for me, yet. I like… unusual use of instruments. Probably we can mention Lightining bolt. The things they do with only bass and drums are really interesting. I also like minimalistic stuff : you only use the sound of your instrument but try to make something really strange.
Are
there any French bands that you like at the moment ?
A : Yes, I like Psychotic monks – quite like the Irish band Girl band. I even want to bring them to Russia but I don’t know how to contact them… Also Harpon, frightening music ! There was a band called Doppler. I heard them five or seven years ago and they totally blew my mind : so emotional, so technical, so cool.
S :
I would say that… Some time ago, I stopped listening to records by
emerging bands. Because I always want to see the band live first. The
records are often a bad intermediary for the energy that the band has
live. So I prefer going to live shows. Sometimes the records are
cool but on stage it’s not so powerful and no so emotional. And
also I’m in my thirties so I think it’s time to stop aligning my
identity with the music I listen to. I don’t care about the style.
I listen to jazz, academic music, everything ! It’s just about
the talent of people who are really into what they are doing.
A :
Actually, I do remember another French band : Aussitôt mort…
or Mort mort mort ! We played with them in Moscow and Denis
drove them ! It would be a crime to forget cool French punk
bands like this.
P : I’m afraid that my answers aren’t that interesting… I’m trying to listen to new music, new bands and so on but, for some reason, I still like bands from the old age and for some reason I am still inspired by the Beatles and so on. Old stuff ! I listen to some new music but my heart, for some reason, is still with this old age. Sorry ! (Laughs)
Suite de nos aventures au pays de la noise. Après une première soirée haute en couleurs – et comment ne serait-ce pas le cas avec les gais lurons légèrement cramés de Dewaere ? -, fatigués mais euphoriques mais attention sans autre drogue dans le corps que l’adrénaline et l’endorphine, on file vers Annecy et son fameux Bistro des Tilleuls.
Là-bas, les choses se lancent doucement. Les Russes ont du retard. On admire les travaux réalisés dans l’été qui optimise l’espace de scène. Jars arrivent. On fait connaissance, on mange et on fait les balances. A peu près en même temps. Matt, qui nous accueille, trime comme un dingue. A la fois au bar, au son et au service. Il est déjà 21 h 30. Les Russes ont l’air trop sympa. Le public est là. C’est cool.
On ouvre la soirée avec Cutter, devant un public déjà bien compact, puis c’est au tour de Jars de monter sur scène. Repérés sur un ou deux webzines et sur la foi de quelques morceaux, on est bien curieux de voir ce que ça va donner.
Jésus, y’a certainement pas de lézard. Jars, c’est le power trio par excellence. Formation rapprochée, combative, qui maintient un feu nourri jusqu’à ce que tu tombes à genoux.
Leur noise-rock sale et lourdingue évoque irrésistiblement quelques figures du genre : Big black, ou Jesus lizard pour les arpèges torves, mais aussi parfois des trucs plus rock mais pas moins énervés – Nirvana période Bleach, pour être précis. Et cette voix rauque gueulée en russe qui en rajoute encore dans la rage crue. Les groupes qui chantent dans leur propre langue ont quelque chose en plus, pas en moins. Enfin, certains.
Le public massé devant la petite scène est immédiatement ultra réceptif. Pogo, chutes diverses et variées, mouvements de foule plus ou moins contrôlés. La salle est sombre, moîte et méchamment houleuse. Soir de gros temps. Sasha, le très sympathique batteur blond, rayonne derrière ses fûts. Il nous fait un show pas possible à base de grimaces maniaco-euphoriques et cogne comme un damné. Plaisir d’offrir, joie de recevoir.
Ce qu’offre Jars, c’est un set intense et punitif, mené d’une main sûre, qui s’achève dans un chaos de larsens et de hurlements. Ce genre de groupe authentique et sincère, qui sera pour toujours hors des radars, ne se croise que sur la route. Fallait être là. L’excellente interview réalisée dans l’arrière-cuisine du resto confirmera pleinement cette impression.
Affaire à suivre, sans aucun doute.
Les chouettes photos sont de l’ami Olive et de son site LowLightConditions.
Retour sur un weekend un peu spécial. Le concert du lendemain – avec les russes de Jars, report à venir – était calé depuis un moment quand Greg nous propose de jouer aussi la veille, avec Dewaere, ce groupe breton qui a sorti un des disques les plus explosif et rafraîchissant de l’année dernière. Wow.
Avec le terme « noise » ou « noise-rock » sur l’affiche, tu as toujours un peu un doute sur le nombre de gens qui va répondre présent, mais il y avait déjà un petit public – beaucoup de têtes connues, forcément – quand on a commencé. On en dira pas plus si ce n’est que, avec les chouettes conditions de sonorisation du Poulpe, ça a vraiment été un bon moment pour nous.
Dewaere, c’est une formation classique guitare/batterie/basse/chant, mais il ne faut pas longtemps au public maintenant plutôt dense pour se rendre compte que Maxwell, le chanteur, est quand même quelque chose d’assez spécial. Grand échalas nonchalant qui, avec sa veste sur le dos, donne toujours l’impression d’être passé là par hasard. J’ai vu un groupe de punk jouer et je me suis dit que j’allais venir foutre un peu le bordel avec mon incroyable chant de crooner débraillé – ce qui est à peu près la façon dont s’est vraiment passé la création du groupe, comme on le verra dans l’interview réalisée après le concert, à paraître bientôt-mais-pas-tout-de-suite.
Mid-tempo sans repos, basse vrombissante, ferrailleuse et une guitare avec un je-ne-sais-quoi de 80s. Mais je sais pas vraiment pourquoi tout le monde ne cesse de répéter « noise-punk » à leur propos – ou alors punk à la Buzzcocks, oui. Dewaere écrit de vraies chansons. Avec ce chant improbable, c’est un cocktail à peu près parfait que sert le groupe. Une formule gagnante et une vraie découverte pour ceux et celles qui étaient là. Joli choix de programmation du Poulpe.
Et ce n’est que le début, comme on le verra bientôt.
The music of the american trio DROSE is a non-identified object in many regards. It’s a kind of slow and deconstructed industrial metal, where field recordings of sounds in a factory – the one where Dustin Rose, the thinking mind behind the band, works – are on equal terms with instruments and sometimes seem to impose their own relentless pace in a man-machine mimetism that is the very own source of inspiration of DROSE. Wether it is on the unique object/record published by the label Computer students (compiling their last album and several other recordings) or during one of their meticulous live performances, the encounter with this band is sure to have an effect on you. After going though that experience at their Urgence disk (Geneva) gig, I felt like following up with a bunch of questions I sent to Dustin by email.
This is your first time as a band touring Europe. What type of experience has this been so far ?
It’s been great! We have been shown excellent hospitality and the shows have been well attended.
The name DROSE seems to suggest that Dustin is central in the creation of your music. Is that the case ? I’ve read that your songwriting starts with the drums but can you shed more light on the process that leads to the writing of your songs ?
It’s true and the songs are usually written starting with a drum composition. The drums are very foundational in this music, so this is where I begin. I find it easy to explore different frameworks from the strongest rhythm element.
The creation of very particular soundscapes is obviously a major part of your music, with a sense of compressed space and the use of machine noises being key elements. Does this come first and do you have to work ways to recreate this sound during your live performances ? Would it be right to say that, in this respect, DROSE is similar to a studio band ?
I collect interesting audio when I come across it and then sort out how I can use it later. In order to bring this audio with us for live performances I have built some equipment to make that possible. We are able to reproduce any sounds from the recording in a live performance.
In particular, I noticed the drums were equipped with a sound system during your gig in Geneva. Can you tell us more about this system ? Are they used to modify the sound of the drums or to activate loops ?
I use pure data (puredata.info) to program our live sets or recordings. The drum sensors and foot switches are brought into pure data using a Teensy micro controller to play and manipulate sound files, synthesized or live audio. The audio is triggered in real-time, there is no click track, it keeps the performances expressive. The program counts drum hits in some sections, waits for button presses or is even allowed to behave randomly in some sections of songs.
The relation between man and machine is a theme running though « Boy man machine ». Would you say that this album is a concept album and, by extension, do you see DROSE as a concept band ?
It’s OK to call it a concept album I was attempting to describe an entire idea. I am not sure DROSE is a concept band.
A very dark, anguished outlook on the relation between man and the machine emerges from your music. Is this just a theme to expand on artistically or can you also see political and ethical implications ?
Some of the ideas or tales of the songs are parallel with political or sociological happenings but it was not a direct intent. boy man and machine are a closed system, each effecting the other and representing thoughts, feelings, situations or experiences.
I heard you met Julien Fernandez of Computer students while he was on tour with his former band, Passe-montagne, and you were involved in setting up shows in your city. Can you tell us the story of your relationship with him ?
Julien was traveling with his band Passe Montagne. I believe it was 2009 or 2010 summer. My band Toads and Mice hosted Passe Montagne and The Conformists in Dayton Ohio. We were all friends instantly, it was a great time.
I hardly know anything about the musical and artistic scene in Columbus, Ohio. How does a band such as yours fit in with the local scene ?
The Columbus Ohio music scene was very hospitable to DROSE, I am grateful to everyone who has ever came to a show, bought something or shared.
I’ve been told there’s a new DROSE album in the works. How do you approach this new recording and what do you expect from it ?
That’s true! This material has a different sound but it’s the same DROSE.
La musique du trio américain DROSE est un ovni à bien des égards. C’est une sorte de métal industriel lent et déconstruit, où les field recordings des sons mécaniques d’une usine – celle-là même où travaille la tête pensante du groupe, Dustin Rose – jouent à jeu égal avec les instruments et semblent parfois leur imposer leur cadence immuable dans un mimétisme homme-machine qui est la source même de l’inspiration de DROSE. Que ce soit sur l’objet-disque singulier publié par le label Computer students ou lors de leurs performances live méticuleuses, la rencontre avec ce groupe ne laisse pas indemne. Après en avoir fait l’expérience lors de leur concert à Urgence disk (Genève), j’ai décidé de prolonger la rencontre en envoyant quelques questions par mail à Dustin.
C’est la première fois que vous tournez en Europe. Comment ça s’est passé jusqu’ici ?
Super bien ! On a été très bien accueillis et il y a pas mal de monde aux concerts.
Le nom DROSE laisse supposer que Dustin (Dustin Rose, NDLR) joue un rôle central dans la création de votre musique. Est-ce effectivement le cas ? J’ai lu que vos morceaux commençaient avec des parties batterie mais pouvez-vous nous en dire un peu plus sur le processus de composition ?
C’est vrai et les morceaux partent généralement d’une idée à la batterie. Les parties batteries sont absolument fondamentales dans notre musique, donc c’est avec elle que je commence. C’est facile d’explorer différents paysages sonores à partir d’un élément rythmique solide.
La création de paysages sonores est une partie essentielle de votre musique, dans lesquels un sens de l’espace sous pression et l’utilisation de bruits de machines jouent un grand rôle. Est-ce-que c’est ça qui vient en premier et vous devez ensuite trouver des manières de recréer ces sons durant vos concerts ?
Je collectionne des sons intéressants quand il m’arrive d’en rencontrer et je vois ensuite comment je peux les utiliser. J’ai construit le matériel nécessaire pour incorporer ces parties dans nos concerts. On est capable de reproduire n’importe quel son en live.
En particulier, j’ai remarqué que la batterie était équipée de capteurs durant votre concert à Genève. Pouvez-vous nous en dire plus sur ce système ? Est-ce-que vous l’utilisez pour modifier le son de la batterie ou pour activier des boucles ?
J’utilise Pure data (puredata.info) pour programmer nos sets live ou nos enregistrements. Les capteurs sur la batterie et les footswitchs sont ramenés vers Pure data par un mico-contrôleur Teensy qui active et manipule des fichiers sons, préparés ou joués live. Les sons sont activés en temps réel, il n’y a pas de click, pour garder le côté expressif du live. Le programme repose sur la batterie dans certaines parties, sur des boutons qu’on presse ou peut même s’activer de manière aléatoire dans d’autres parties des morceaux.
La relation homme-machine est un thème qui court tout au long de « Boy man machine ». Dirais-tu que ce disque est un concept-album et considères-tu, par extension, DROSE comme un groupe-concept ?
On peut dire que c’est un concept-album dans le sens où j’essaye de faire le tour d’une idée. Je ne suis pas sûr que DROSE soit un groupe-concept.
L’impression qui ressort de votre musique est celle d’un regard très sombre et angoissé sur la relation entre l’homme et la machine. Est-ce pour toi d’abord une thématique artistique ou y vois-tu également des implications éthiques et politiques ?
On peut faire des parallèles entre certaines idées ou histoires racontées dans nos morceaux et des faits sociologiques ou politiques mais ce n’est pas directement notre intention. L’enfant, l’homme et la machine forment un système clos sur lui-même, où chacun des éléments affecte l’autre et représente certaines pensées, sentiments, situations ou expériences.
J’ai entendu dire que vous aviez rencontré Julien Fernandez, du label Computer Students, alors qu’il était en tournée avec son ancien groupe, Passe-montagne, et que vous vous occupiez d’organiser des concerts dans votre ville. Pouvez-nous raconter cette histoire ?
Julien était en voyage avec son groupe Passe-montagne. Mon groupe Toads and mice avait invité Passe-montagne et The Conformists à Dayton, Ohio. On est immédiatement devenu amis, c’était un moment génial.
Je ne connais presque rien de la scène musicale et artistique de Columbus, Ohio. Comment un groupe comme le vôtre est-il perçu et quelle place occupe-t-il dans la scène locale ?
La scène musicale de Columbus s’est montrée très accueillante vis-à-vis de DROSE. Je suis reconnaissant envers toute personne étant venu assister à un concert, ayant acheté ou partagé notre musique.
On m’a dit qu’un nouvel album de DROSE était prévu. Comment approchez-vous ce nouvel enregistrement et qu’en attendez-vous ?
C’est exact ! Les morceaux ont un son différent mais c’est bien le même DROSE.
C’est peut-être bien que je dois traîner dans ces musiques depuis trop longtemps, mais si il y a un mot qui me tient en haleine, attise chez moi une curiosité fiévreuse et me pousse vers tel concert ou tel disque, c’est celui de déconstruction. Le rock en morceaux, mis en pièces puis remonté à l’envers et fourni sans véritable mode d’emploi si ce n’est celui que ton cerveau construit. Ou pas. Allez comprendre. Par contre, entre les réactions génées du type « C’est particulier… » et les soupçons d’élitisme, on est d’accord que c’est certainement une des meilleures façons de perdre ses amis. Mais bon, faut avoir le courage de ses opinions de temps en temps.
Quoi qu’il en soit, la première écoute de l’album Boy man machine du trio américain DROSE a été un choc, redoublé par l’annonce de leur venue à Genève. L’organisation de ce concert assez peu médiatisé aura connu quelques péripéties : d’abord annoncé à l’Usine, il avait été pressenti un moment à l’Ecurie pour finalement se dérouler à Urgence disk.
La petite salle/bar de la boutique plutôt remplie est encore à l’heure de l’apéro et du concert qui a eu lieu juste avant, d’un tout autre style quand les américains arrivent et lancent le set presque aussitôt. Bruits répétitifs. Mécanisés. Domptés. Leitmotiv industriel de la musique de DROSE. Noise-rock suffocant. Eclatant par spasmes. Semblant se débattre contre le règne de la machine, lutter contre son propre engloutissement. Le groupe ne comporte pas de bassiste, mais le son est absolument massif, même avec des protections auditives (et valait mieux).
La silhouette frêle de Dustin Rose et sa voix cristalline, spectrale -à vrai dire assez difficilement perceptible dans le mix – contraste avec la lourdeur et le fracas qui l’enveloppent. Scandée par la batterie minimaliste de John Mengerink, la musique de DROSE développe un vocabulaire qui lui est propre – même si on peut penser à la première période des Swans – et un sens de l’espace sonore et du silence assez impressionnant.
C’est la tête-chercheuse Computer students qui a reédité leur album mais, si on m’avait dit que c’était un label comme ECM, ça ne m’aurait pas plus étonné que ça. De la même manière, on les as vus dans cette microscopique antre qu’est Urgence disk mais qui peut dire dans quel sorte de salle ils passeront dans 5 ou 10 ans ?
Un certain nombre de personnes quittent la salle au fil du concert, déroutés par l’étrangeté ou rebutés par le volume sonore. Pour les autres, les tenaces, l’expérience sonore est au rendez-vous. Au final, une expérience typique de l’Usine – celle d’être une poignée de personnes dans un lieu improbable assistant à la performance d’un groupe singulier.
Bien sûr, un jour il y aura un petit malin qui aura tout compris et qui viendra nous expliquer qu’on a vu un groupe de slow-indus ou une foutaise de ce genre – exactement comme le jour où j’ai découvert avec stupéfaction que certains rangeaient Don caballero dans une petite boîte qui s’appelait math-rock ou Heroin dans un machin appelé screamo. On s’en fout, on sait juste qu’on a vu un putain de groupe qui vit intensément sa musique et qui ne ressemble nul autre.
Avec Cutter, on aura le plaisir de jouer deux fois ce weekend. Cette petite pub, c’est pas tellement pour nous – quoique, hé hé – mais surtout parce que ce sera avec deux très chouettes groupes – Dewaere et leur noise-rock lyrique explosif, Jars et leur post-punk noise hargneux – et dans deux supers endroits (les deux meilleurs du coin ?) : le Poulpe et le Bistro des Tilleuls.