Après 7 ans de plus ou moins bons et loyaux services, l’aventure Rad-Yaute s’arrête ici.
Je maintiendrai la page pendant un certain temps. Si jamais un contenu vous intéresse, servez-vous ou faîtes-moi signe (rad-yaute@mailoo.org) – par ailleurs je suis toujours Tom Rad-Yaute sur un certain réseau social un peu connu.
Lorsque j’écrirai, ce sera sur le très chouette webzine collectif Rictus.info.
A plus, ici ou là – portez-vous bien.
Tom
After seven years of more or less good and loyal services, the Rad-Yaute adventure is ending here and now.
I’ll keep the site active for some time. I f you’re interested in some of the content, well, help yourself or give me a shout (rad-yaute@mailoo.org) – and I’m still Tom Rad-Yaute on a certain somewhat well-known social networks.
When I’ll be writing, it will be for the awesome collective webzine Rictus.info.
Romain Frélier-Borda est un garçon bien occupé. Romain Frélier-Borda joue dans tout un tas de groupes ou de projets dont on reparlera dès que possible. Mais avant ça, il y a longtemps, Romain a joué, un peu de tout, dans un projet éphémère nommé Post. Et ce projet-là t’écharpe méchamment les oreilles. Basse massive et distordue, batterie appuyant ses coups, voix monocorde et hargneuse. Ambiance dansante et désespérée, dub crâmé, relents de Public image limited qui traînent. Quatre titres qui ne font pas rire du tout pour un EP qui n’existe qu’en format numérique et qui s’écoute immédiatement ici.
Duo de guitares électriques grenoblois qui a toute une vie derrière lui mais découvert avec ce disque. Trois plages sonores où des motifs minimaux se déploient, dérivent, s’interpénètrent, mutent et se mélangent lentement. Où leurs spectres s’étirent, se diluent, se décomposent. Distortion suspendue en eau profonde. Abstrait mais lisible.
Sun stabbed, In girum imus nocte et consuminur igni LP (Doubltful sounds)
On n’arrête Nevraska pas comme ça. Malgré une conjoncture pas franchement favorable, le duo annecien garde la tête froide, contourne les obstacles, joue serré et présente son deuxième album en temps et en heure (pas franchement comme cette chronique qui a mis bien du temps à venir). Placé sous le signe du mouvement des droits civiques US (le bus, Rosa parks), ce nouveau disque est emballé dans une fort jolie pochette en forme d’hommage à la fois à un certain groupe post-hardcore suédois et au graphisme classique des disques de jazz. Jérémy – dit « Kick » – a remplacé Cyril derrière les fûts mais comme il jouait auparavant dans Human side avec Pascal (basse), on reste en famille.
Changement dans la continuité, donc, et on retrouve sans peine sur ce disque la formule explosive et cinématographique qui fait tout le sel et le charme du duo. Joutes rythmiques de haut-vol, tir nourri, répétitions qui font monter une électricité affolante et te traversent de part en part, magnifiée par le son à gros grain forgé dans le studio de Serge Morattel. Les samples – souvent des enregistrements de voix, récits, monologues – font contrepoint et donnent aux morceaux leur caractère narratif. Un peu comme une hybridation sous les auspices de Doppler et de Microfilm, en quelques sortes.
Mais « I left work on my way home December 1st 1955 » réserve aussi son lot de surprises. Des invités apportent leur touche et diversifient la palette. Sur le morceau d’ouverture aux accents émo-rock, « Nothing to live with the law, c’est la voix de Benjamin Prieur – qui avait été un temps pressenti pour être le chanteur du groupe mais qui est surtout celui de Nurse, autre groupe très marquant issu du même coin. Le duo s’essaye à un morceau délicat et noisy – « A bit more » – avec une colonne vertébrale électronique et un chant féminin aérien. Des gerbes d’un saxo étranglé jaillissent sur le final furieux de « Hornet vision », une guitare bluesy qui fait « Interlude » et porte le récit de Rosa Parks et un chant parlé (bon, ok, c’est moi…) sur le final de « Invisible walls » – morceau ultra efficace et absolument imparable en concert. Dans le sillage des expérimentations de Human side, Nevraska concrétise un peu plus les envies d’ouverture affichées depuis ses débuts.
Loin du lyrisme, des poses ou du formalisme convenu qui sévissent dans les scènes post-hardcore ou post-punk, Nevraska est un groupe libre, qui ne prend ses ordres de personne et n’aspire qu’à faire une musique vivante et vibrante – ou des « ziks cools », comme le dit Pascal avec son sens de la formule lapidaire. « Vous voyez la rage ? Vous voyez la jubilation ? Vous les trouvez difficilement compatibles ? Et pourtant… » dit encore le texte de présentation de l’album… Ce programme, Nevraska le tient parfaitement. Fonce découvrir cette pépite qui crépite.
Nevraska, I left work on my way home December 1st 1955 (GabuRecords, Urgence disk, Après vous records)
Toujours se méfier de ce qui est estampillé métal ou affilié et qui vient de Suisse, ils ont une tradition d’excellence dans le genre. Le nom de Convulsif ne cessait de revenir – que ce soit dans la programmation de Cave12 ou dans celle de l’excellente asso Drone to the bone (que la nostalgie finira par rendre mythique) – mais ce n’est qu’avec ce cinquième album que je les découvre vraiment. Ca fait un bout de temps que des groupes pratiquent ces musiques tout en les faisant sortir du format rock pour les emmener sur des terrains beaucoup plus ambitieux, un peu comme si elles étaient entrées dans une période de maturité. Morceaux dépassant régulièrement les dix minutes, influence des musiques jazz ou contemporaine parfois, croisements audacieux. Comme leurs collègues de label, HEX, Convulsif est de cette trempe-là.
Chez Convulsif, c’est un violon et une clarinette basse qui font face au traditionnel basse-batterie et qui, autour d’un axe rythmique féroce, sculpté, volontiers répétitif et minimaliste, déploient leurs figures. En ouverture de l’album, « Buried in one » fait ainsi défiler des plages bruitistes dans une sorte d’écriture syncopée vraiment frappante, tandis que les notes tenues de « Five days of open bone » viennent s’enrouler sur une basse aux aguets dans une montée presque post-rock – mais, chez Convulsif, le post-rock vient se fracasser sur une vague furieuse où le quatuor fait la démonstration de toute la brutalité dont il est capable. La machinerie atteint des dimensions franchement stratosphériques sur le tournoyant « The axe will break ». Aussi bien, Convulsif ne dédaigne pas pour autant le format coup de poing comme sur « Feed my spirit side by side » où la basse et ses coups de butoir rythmés comme des frappes de boxeurs sont à l’honneur, ni les dingueries hybrides, les rythmiques monstrueuses et concassées qui finiront par se destructurer tout à fait de « Torn from the stone » et « Surround the arms of revolution ». On pense tout à tour à John Zorn, à Noxagt, à Morkobot.
Dans ce théâtre fracturé, le groupe se montre totalement maître des temporalités qu’il impose, tantôt déployées à l’infini, tantôt brutalement repliées sur elles-mêmes, comme au coeur d’une décharge de foudre. Un champ de perturbations magnétiques fascinant dans lequel il était grand temps d’entrer.
Véritable fourmi de l’underground pas du tout du genre à rester inactive – il n’y a qu’à voir sa liste infinie de concerts annulés depuis mars dernier -, L’Orchidée cosmique a profité du 1er confinement pour enregistrer ce nouvel EP. Dispo en version numérique sur son bandcamp, c’est l’inoxydable label genevois Urgence disk qui en sortira la version CD. Nouveau voyage interstellaire, donc, en 4 titres qui permettent de revisiter ou de découvrir son univers musical. Apesanteur presque irréelle avec « Les Dauphins », gros riff épique de « The Green thing », ambient futuriste de « Cumulus » ou « Cirrus » cinématographique, L’Orchidée préfère toujours le trait net et clair et continue à dessiner minutieusement les contours du post-métal cotonneux, presque pop, qui n’appartient qu’à lui. A découvrir.
Si j’avais été plus rapide et qu’on était encore en été, j’aurais dit que ce disque – sorti en février dernier sur le label auvergnat Petrol chips – était la bande-son idéale d’un air vicié, le générique des faux-semblants, l’antidote à un soleil trompeur. David Litavicki – soit la moitié du très recommandable duo grenoblois Churros batiment – s’y laisse aller à 12 compositions aussi hétéroclites et instables que ton humeur. Easy-listening à la dérive, rap-rock pour black-bloc en crise, sans oublier une veine un peu surréaliste/kafkaïenne (« Les blattes ») qui est une de ses marques de fabrique. Bleu russe bricole des images brutes, fabrique des métaphores au fer à souder, colle les rimes à la truelle. Un paradis artificiel de mots, une ballade azimutée au cours de laquelle on croise autant les fantômes de Gainsbourg que ceux de rappeurs crânes ou hagards et qui vaut franchement le détour.
La découverte marquante de son travail m’a donné envie de prolonger la rencontre avec la plasticienne Johanna Perret en lui envoyant quelques questions. Cette interview a été réalisée par mail durant la période de confinement du printemps 2020.
Le monde s’est arrêté, le temps est suspendu. Nous sommes confinés chez nous depuis maintenant plus d’un mois à cause de l’épidémie de COVID-19. Comment vis-tu cette période si particulière ?
Plutôt bien, très bien même. En tant qu’artiste, je suis en quelque sorte une confinée volontaire permanente, je ne vis donc pas cela comme un choc social.
Le confinement à ceci de positif, il me libère complètement des obligations du quotidien, le temps peut ainsi s’étirer à l’infini. Cette déconnexion permet de s’immerger totalement dans des questionnements relatifs à l’infinie variabilité des nuances, au rapport entre le motif et le format, à l’immanence lumineuse de la couleur…etc.
Aussi, je vous invite chaleureusement à aller visiter le site http://tribew.fr/lesamisdesartistes/. C’est un groupe de soutien aux artistes plasticien.ne.s touché.e.s financièrement par la crise covid-19. Ce collectif a été créé durant le confinement par des personnalité.e.s du monde de l’art : galiériste, critique, commissai, etc. Des ventes en ligne sont organisées pour soutenir les artistes privé.e.s de revenus et non éligibles aux aides gouvernementales (30% des ventes sont versés dans un fond de solidarité). Vous pouvez accéder à toutes les œuvres en vente via le #lesamisdesartistes. Les œuvres à moins de 500€ sont sous : #lesamisdesartistes500. On s’organise!
Ton exposition à l’Angle, – « Soluble » – vient de se terminer. Je crois que toutes les pièces de cette exposition ont été créées pour l’occasion… Est-ce-que c’est un moment particulier, la fin d’une exposition ?
Pour moi, non, c’est plutôt un moment relevant purement du pratico-pratique, c’est-à-dire qu’il faut emballer les toiles, organiser un transport et trouver un nouvel endroit de stockage dans l’atelier. C’est plutôt le vernissage qui tient du moment particulier car c’est l’aboutissement d’un cycle de travail souvent long et les jours précédents sont toujours intenses.
La vallée de l’Arve est un peu le « personnage central » de « Soluble ». Est-ce-qu’il y avait chez toi dès le départ une volonté de faire un art en prise directe avec le monde qui t’entoure ou est-elle venue progressivement ?
Pas du tout ! Au début, j’étais plutôt tournée vers la figure humaine et sa représentation. Le travail sur la vallée est une conséquence directe du problème de la pollution de l’air. Cette recherche a débuté en 2016-17, durant notre triste record du plus grand nombre de jours passés en alerte pollution maximum (36 jours). A cela s’était ajouté un brouillard épais et teinté de reflets inhabituels. C’est à ce moment-là que j’ai senti une sorte d’urgence à établir un état des lieux visuel de ce qui était en train de se produire. Il faut aussi préciser qu’à cette époque le problème était une réelle omerta. Ce positionnement environnemental est toujours présent dans mon travail, à travers la question de la disparition du paysage, mais maintenant mes préoccupations sont nettement plus picturales.
Il y a évidemment un aspect conceptuel dans ton travail, une réflexion sur la représentation, mais j’ai été frappé par son accessibilité, sa lisibilité. Est-ce-que c’est quelque chose qui est important pour toi ?
L’accessibilité de l’art est importante pour moi, bien sûr. Mais ce n’est pas cela qui guide mon travail, c’est-à-dire que je ne me dis pas en peignant « il faut développer un concept qui soit accessible à tous », ça c’est de l’éducation, pas de l’art.
Toutes tes peintures sont réalisées à la peinture à l’huile. C’est un parti-pris d’opter pour ce médium au temps d’exécution assez long ?
Oui et non.
Non, car j’ai toujours peint à l’huile depuis l’enfance. Ma mère était une peintre amatrice et elle ne travaillait qu’à l’huile et à l’encre (qui est mon autre médium de prédilection). J’ai donc naturellement commencé à peindre à l’huile, pour moi cela relève de l’évidence.
Et oui, car pour travailler les transparences, rien n’égale l’huile… ! De plus, l’huile est bien plus indulgente que l’acrylique, elle autorise le repentir. Avec elle, on a deux ou trois jours devant soi pour changer d’avis ou rectifier une nuance, c’est un luxe.
Je crois également qu’il y a une part autobiographique, généalogique, dans ton travail, puisque tu viens d’une famille de décolleteurs. Peux-tu nous parler un peu de ta relation à ce métier et au rôle qu’elle a joué dans ton travail artistique ?
En art, tout est toujours autobiographique, on ne parle bien que de ce que l’on connaît profondément.
Cette part généalogique est arrivée par surprise. Je pense que l’influence qu’a pu avoir ce métier dans ma manière d’aborder l’art est de l’ordre de la rigueur et de la chromie. Pour être décolleteur, il faut être résilient et dur à l’ouvrage, qualités indispensables pour le métier d’artiste. Mon père et mes deux grand-pères ont tous trois été décolleteurs. J’ai donc fréquenté le brouhaha des CN, l’odeur des solubles (que j’adore) et les tas de limailles dégoulinant de couleurs irréelles (chromie des solubles) durant toute mon enfance.
L’exposition « Soluble » contient une série de peintures non-figuratives et je crois que c’est une première pour toi. Peux-tu nous parler un peu de ce que l’abstration représente pour toi et du processus qui t’a mené vers elle ?
Pour moi, l’abstraction c’est « sans filet ». Le motif est une excuse, un point d’ancrage où se stabiliser dans le réel. L’abstraction est fatale, elle n’autorise pas l’erreur. Le risque est de tomber dans la complaisance picturale, qui n’est plus de l’art, mais de la décoration. Avec l’abstraction, on est seul.e avec la matière, qui doit s’exprimer uniquement par sa résonance, sa lumière, sa tonalité, sa saturation, ses transitions… Pour toutes ces raisons, j’ai mis du temps à passer le cap.
Le processus est simple : je me suis mise à tellement recouvrir le motif de certaines séries que la frontière entre l’abstraction et la figuration était presque inexistante. C’est alors que je me suis rendu compte que j’étais capable de faire tenir un tableau uniquement fait de couleur et de lumière, je n’avais plus peur.
Tu as pour la première fois proposé une installation en volume constituée de paniers de décolletage et d’ardoises provenant d’une carrière. Est-ce que ça t’as donné envie de réitérer cette expérience pour d’autres expositions ?
J’aime l’idée de créer des dialogues entre mes tableaux et des objets tridimensionnels. Cela permet aussi de travailler l’espace de l’exposition à la façon d’un Tokonoma. Je me sens proche de la manière dont la culture japonaise aborde l’idée d’espace, de vide et d’ombre. La chorégraphie du vide est très importante pour créer des atmosphères, ainsi qu’un cheminement donnant de la cohérence à l’ensemble des pièces proposées.
Quel serait le fil conducteur entre tes travaux antérieurs graphiques, la série des « Scènes de Jouy » par exemple et ceux réalisés spécialement pour l’exposition à l’Angle ?
La perception du réel. Tout est une question de point de vue, d’observation et de volonté. Les huiles brouillent la lisibilité et le statut du sujet en épurant la composition du tableau, et les SDJ perdent le regard dans la masse de détails ornementaux qui perturbent la lecture du sujet. Ce sont deux manières opposées de parler de la même chose : comment hiérarchisons-nous les diverses strates du réel?
Quelles sont quelques-unes des figures artistiques qui comptent ou ont particulièrement compté pour toi ?
Il en y en a tellement… je vais essayer de vous en faire une liste non exhaustive : Sugimoto, Rushia, Ehrhardt… Les abstrait américains : Rothko, Frankentaler…etc. pour leur rapport à l’essentiel. Le siècle d’or espagnol pour leur « gravitas », ex: Zurbaran, Murillo, El greco… Et plus tard Goya pour les mêmes raisons. Courbet et les naturalistes pour l’amour du réel, les impressionnistes pour les atmosphères, Monet en tête. Les nordiques pour la lumière douce et immanente : Vermeer, Rembrant, Friedrich, Hammershøi…
Y-a-t-il d’autres artistes de la vallée de l’Arve ou d’ailleurs avec qui tu te sens des affinités et que tu voudrais nous faire découvrir ?
C’est une question difficile à laquelle je préfère ne pas répondre car les inclinaisons artistiques changent vite et les goûts sont versatiles. L’influence de l’amitié pèse trop lourd dans l’interêt que suscite l’œuvre d’un.e artiste ami.e. Je ne m’estime pas suffisamment objective pour pouvoir répondre.
La musique t’accompagne-t-elle dans ta création d’une façon ou d’une autre ?
Dans l’atelier je travaille toujours avec de la musique, la radio ou des lectures audio. J’aime tout type de musique : électro, rock, noise, blues, jazz, folk, chansons françaises, polyphonies, musique traditionnelle, etc. Tout dépend de de l’humeur du moment !
Avec Rémi Dal Nagro, vous avez le projet d’ouvrir un lieu artistique dans la vallée de l’Arve : Relief. Peux-tu nous présenter ce projet ?
Relief est en cours de création, il intégrera des ateliers, un espace d’exposition, une cuisine-bar, un studio de production audio, une salle de concert, un espace central amovible et un jardin partagé. L’association est installée à Cluses, au rez-de-chaussée d’une ancienne usine de décolletage.
Relief à pour vocation d’être un espace singulier et pluriel, dédié à toute personne souhaitant parcourir les passerelles existant entre les diverses formes d’expression. Tourné vers le public, Relief se veut évolutif, impermanent, ancré sur son territoire autant qu’ouvert à l’international.
Concrètement, les actions de la structure se développent en trois grands axes : développement culturel, lien social et éducation.
Un chantier bénévole se mettra en place dès que la crise sanitaire le permettra. En soutien au projet Relief, un événement se déroulera dans ses murs en cours de montage dès que possible ( probablement aux alentours de septembre-octobre ).
Merci à Anne pour son aide.
Dernière minute : l’exposition « Soluble » est prolongée du 9 au 26 juin à l’Angle sur rendez-vous.
Le live ne ment pas : sur scène, It it anita est un groupe atomique avec une force d’entraînement considérable. Leur venue au Poulpe a été l’occasion de leur poser quelques questions, que les Belges supersoniques ont vite transformées en conversation virevoltante. Pour des raisons qui m’échappent, cette interview a un peu traînée et n’est publiée que maintenant, alors que le groupe est actuellement en studio pour enregistrer son troisième album. Merci en tous cas à eux.
Votre 2e album est sorti sur Vicious circle il y a quelques temps, vous tournez beaucoup et le groupe marche bien. Qu’est-ce-que ça a changé dans vos vies, ce relatif succès ?
Damien : Oui, on fait tous plus que ça ou des métiers qui sont liés à ça. Elliot est régisseur, Bryan est batteur avec d’autres projets aussi, Mike ne fait que It it anita, plus écrire, écrire, écrire… et il élève des poules aussi. Moi, je m’occupe aussi d’un label à côté donc je suis aussi manager et booker. Ca veut dire qu’on a réussi à se façonner des emplois du temps qui nous permettent de tourner quand on doit tourner. Par rapport à l’album, c’est vrai aussi que c’est lié à l’arrivée sur un plus gros label. Avant, on sortait les trucs nous-mêmes, on s’était fabriqué un petit label indé sur la Belgique mais depuis qu’on est arrivé sur Vicious circle et qu’on est avec le tourneur Jercob, on a beaucoup plus de promo, beaucoup plus de dates.
Et, vous appréciez, j’imagine, cette vitesse supérieure ?
D : Ah, ouais. Complètement !
Mickael : La France, c’est grand ! On peut faire 40 dates en France ! On a tourné avec Lysistrata et on a fait pleins de beaux endroits.
D : On a monté le groupe en 2013 et on savait qu’on allait tout faire pour que ça fonctionne le mieux possible. Donc par rapport à cette vitesse supérieure, je ne dis pas qu’on s’y attendait mais, en tous cas, on était prêts, si ça arrivait, à pouvoir s’organiser en conséquence.
Tu sortais les disques d’It it anita sur Luik records, c’est ça ?
D : Au départ, on avait monté Luik parce qu’on s’était dit que plutôt que sortir un truc autopromo, on allait se fabriquer une petite étiquette. Les choses ont évolué, on a eu un groupe, deux groupes de potes qui nous ont dit « Tiens, j’ai un album qui est prêt » et, de fil en aiguille, je me suis improvisé booker parce que les groupes, pour vendre des disques, il faut qu’ils tournent. Maintenant avec It it, on a un label et un booker extérieur, on peut se concentrer sur le reste et pas du tout sur l’aspect prod.
On vous a sûrement déjà posé cette question mais votre disposition scénique, les uns face aux autres, d’où est-ce-que c’est venu ?
Elliot : Ca fait longtemps qu’on nous l’a pas posée… (Rires)
D : Je me demande si, un jour, on s’est pas dit qu’on mettrait les amplis en side parce qu’ils vont quand même très forts et pour éviter qu’ils tapent direct dans le gueule des gens… Et puis on s’est mis nous-mêmes de côté. On a aussi des chants qui se répondent un peu en ping-pong. Ca a dû venir de là…
Vous êtes comme ça, en répète ?
Mickael : Pas du tout ! On répète comme des gens normaux !
E : Sur scène, en tous cas, c’est très agréable. On se voit les uns les autres, c’est vraiment l’essence même de la musique qu’on fait. Il y a un aspect énergique entre nous. Ce qui ne nous empêche pas du tout de nous tourner vers les gens, loin de là !
Et, du coup… le déplacement de la batterie dans la salle ?
Mickael : C’est du jamais vu !
Damien : Je ne vois pas de quoi vous parlez ! (Rires)
Elliot : Ca n’arrive pas à chaque fois ! Souvent mais pas toujours…
Ah, c’est un bon signe, alors ? C’est que c’est bien ? Ou alors, c’est parce que vous vous emmerdez…
Elliot : Y’a plein de facteurs, faut avoir des cables assez longs…
Mickael : Nous, on sait pas toujours comment ça va se finir. Il y a un côté inattendu et amusant pour nous et pour les gens. C’est win-win !
Elliot : C’est une vraie liberté, c’est marrant ! Quand on le fait, c’est vraiment qu’on a envie de le faire !
Est-ce-qu’il y a l’idée de casser un peu la routine du concert qui est finalement assez ritualisée et un peu « safe » ?
Damien : Non, mais tu verras, on rigole beaucoup, hein !
Elliot : C’est dur de se réinventer chaque soir…
Damien : C’est sûr que quand je vois les shows de Lysistrata ou des Monks (Psychotic monks, NDLR), nickels en termes de lumières, où tout est super beau… Nous on n’est pas vraiment là-dedans. On envoie ce qu’on envoie et puis entre deux morceaux, Bryan fait des blagues – enfin Henri fait des blagues – moi, je raconte des conneries et souvent ils me demandent de fermer ma gueule.
M : Et certains autres membres du groupe sont anti-lights. Moi, je trouve qu’un bon concert se suffit à lui-même. Quand c’est trop léché et trop travaillé, ça veut dire que tout est trop léché et travaillé.
Elliot : Effectivement, mon deuxième métier c’est régisseur lumières mais, dans le cadre de It it anita, je le vois quand même avec un œil de musicien et je suis capable de faire une différence !
Damien : Donc, tu es d’accord qu’on ne veuille pas de lumière ? (Rires) On a déjà fait un concert avec une vidéo de NBA derrière. Pas de lumière, juste une projection d’un match ou les meilleures actions de Jordan…
L’autre jour, je regardais un documentaire sur le queercore et la vague homosexuelle hardcore et ça m’a vraiment frappé la façon dont ces mecs voyaient d’abord le punk comme de l’activisme et l’utilisaient pour foutre le bordel et pour choquer les gens. Je me disais que c’était quand même fort… Est-ce-que vous, vous vous concevez plutôt comme des musiciens ou aussi comme des activistes d’un mouvement culturel ou artistique, quel qu’il soit ?
Elliot : Je pense qu’au moins, ils faisaient des choses… Michael est président de la Turbojügend ! C’est un peu des icônes gays, non ?
Mickael : Pas que gays…
C’est quoi la Turbojügend ?
Mickael : C’est l’espèce de fan-club mondial de Turbonegro. Beaucoup de villes dans le monde ont ce club d’amis proches – très proches – et ils font beaucoup d’activités, vont voir les concerts, ils font du karting, ils ont des vestes très typiques… Moi, je me considère comme un menestrel (Rires aigus) Quelqu’un qui enfourche son cheval le matin et qui doit aller dans le royaume d’à coté faire un spectacle, il doit jongler et puis on lui jette une petite pièce, puis il va ailleurs.
Damien : Et il se moque du roi…
Mickael : Je me sens pas très en phase avec la… culture actuelle de masse. On divertit mal les gens, c’est une drôle de période. Et puis, quand on grandit, on se pose plus de questions parce qu’on a aussi des enfants et on se demande quels seront leurs repères et y’a pas pire repère qu’un Black Friday. Je trouve qu’on vit dans un drôle de monde où il y a plus vraiment de repères. Je suis pour un retour à la simplicité.
Elliot : Pas de lights ! (Rires)
Damien : On est sensible au monde qui nous entoure et on a envie de raconter des choses qui ne vont pas mais on n’est pas activistes. On va pas dénoncer des choses sur scène.
M : Moi, je trouve qu’à partir du moment où les gens dénoncent des choses sur scène, c’est plus de l’activisme, c’est du théâtre. Je crois que tu peux être activiste sans t’en vanter. En fait, ce qui manque à tout le monde, c’est de la citoyenneté. C’est ce qui manque comme cours à l’école primaire : être un citoyen qu’est-ce que c’est ? C’est devoir faire des choses pour les autres et avoir des choses en retour.
D : A l’époque où Fugazi et Minor threat ont lancé leur mouvement straight-edge, ils allaient dans un sens mais c’était pas théatralisé. Que leurs concerts et leurs disques soient accessibles à tout le monde, c’était engagé mais c’était pas théatralisé. Et leurs principes sont encore appliqués maintenant…
Quoique Ian MacKaye n’ait jamais considéré qu’il ait lancé un mouvement…
Damien : Justement, ça va dans ce sens-là ! Il n’a pas du tout envie de s’approprier le truc ! Il y a des principes qui sont là. Il a réussi à le faire, il y a des gens qui ont suivi le truc.
Elliot : Prenez ce que vous voulez, quoi.
Je ne pensais pas forcément uniquement à un sens politique, d’ailleurs… Ca peut être plus large que ça. On peut aimer et militer pour certaines formes de musiques imbuvables pour d’autres et avoir envie de faire vivre une scène autour de ça, organiser des concerts, s’investir dans des lieux… Un esprit activiste qui est un peu à la base de ces musiques. D’ailleurs, je sais même pas si ces musiques sont viables sans cet esprit-là… Rentables, oui, pour certains sûrement, mais pas pour d’autres…
M : C’est un grand débat… C’est comme les services publics… Est-ce que le train doit être un service rentable ? Je ne crois pas. On ne devrait pas limiter les budget du service public. Ca devrait être no budget. Je crois que le citoyen devrait avoir beaucoup plus de facilités pour plein de choses. Parler de musique et de rentabilité, je trouve ça un peu bizarre. Est-ce que le foot est rentable ? Combien ça coûte un match ? Combien est-ce que la municipalité de Liège paye chaque semaine ? Des centaines de milliers d’euros, je crois. Et qui en bénéficie vraiment, au final ? Très peu de gens.
D : Y’a eu cette étude, il y a quelques années, sur le fait que la culture rapportait plus d’argent que, par exemple, l’industrie automobile parce que, quand tu vas à un concert, tu consommes, tu va au resto avant…
M : Il y a une sono qui a été louée, le brasseur qui a amené des fûts…
D : Ca créé de la consommation plutôt saine. Il y a des flux d’argent qui au final font que ça rapporte plus que d’autres industries.
Justement, tant qu’on parle du côté économique, je voulais vous interroger sur le rôle des agents qui représentent les groupes et exercent un contrôle qui peut être assez fort. Par exemple, des amis étaient bookés sur une date par le lieu et leur concert a été annulé par l’agent du groupe de tête d’affiche sous pretexte qu’il n’avait pas été prévenu, d’après ce que j’en sais. Est-ce-que vous avez un avis sur ces questions ?
Damien : Si tu veux mon avis, c’est nul.
Elliot : La seule raison que je pourrais entendre, c’est que le mec de la salle booke la première partie, il s’emballe un peu et le groupe de première partie est plus imposant que la tête d’affiche : ils arrivent avec quatorze amplis. Ca, je pourrais l’entendre. Mais sinon, ça peut pas désservir la tête d’affiche.
M : Sauf si le support est meilleur que la tête d’affiche !
D : Mais, au contraire, les gens vont se dire « Ah, j’ai passé une super soirée, j’ai vu deux super groupes ! »
E : Ouais, il n’y a pas vraiment de bonnes raisons…
M : Support, c’est très compliqué aussi…
D : Et sinon, pour revenir au début de la question, le rôle de l’agent est quand même important. Il trouve des dates que nous, on ne pourrait pas trouver. Les agents qui sont sensés font un excellent boulot. On a des agents dans tous les pays et on est très content de bosser avec ces gens-là.
Ca vous est déjà arrivé d’être la première partie devant un public qui s’en foutait un peu ?
D : Ah ouais, c’est déjà arrivé ! Pas de souvenirs précis mais on s’est déjà rendu compte qu’on était dans des endroits où c’était un mauvais casting.
E : A côté de ça, on a déjà fait des premières parties où c’était super, aussi. C’est important de le dire. And so I watched you from afar, par exemple… excellente tournée !
D : Et le groupe était très content. Ils nous ont découvert aussi… On a fait six dates avec eux.
E : On s’est hyper bien entendu avec eux. Ils s’intéressaient à nous, ils venaient nous voir, on a eu un très très bon rapport…
M : ils sont techniquement… high level.
D : Ils ont enregistré leur album d’une traite. Ils ont répété pendant un an et ont fait une prise live de l’album de A à Z…
Pour en revenir un petit peu à votre musique, il m’a semblé que vous marquiez un peu davantage les contrastes sur votre dernier album, « Laurent », avec des passages plus pop plus assumés. Est-ce-que c’est une direction que vous prenez pour la suite ?
M : C’est bien aussi pour varier, en concert. C’est contraignant pour nous et pour les gens quand tout est trop fort et trop vite. C’est fatiguant, ton corps dit juste… Slow down baby ! (Rires) C’est bien d’avoir des montées, des descentes, des descentes, des montées. Monter, redescendre un petit peu… (Rires) Et ça, je trouve que Lysistrata le fait très bien !
E : C’est pas spécialement une volonté d’aller vers un truc calme ou violent. Je crois qu’on fait juste ce qu’on a envie de faire, peut-être d’une façon un peu différente de la façon dont on le faisait au début…
D : On écoute tous beaucoup de musiques différentes depuis très longtemps et donc il n’y a pas de raisons qu’on fassent que des trucs nerveux. Si, à un moment donné, on a envie de faire un truc plus stoner, ou plus post-rock, on le fait. Mike avait fait un morceau un peu à la Daft punk, un jour. Bon, il n’a pas été repris mais il existe et il est super !
J’ai lu que vous aviez tendance à arriver avec des morceaux relativement finis en répètes…
M : Pas complètement finis mais, normalement, l’ossature est déjà faite.
D : Mike compose et ensuite on rajoute.
B : A la batterie, il me met toujours une base et il me dit « La base est là, fait ce que tu veux ».
M : Comme les Beatles finalement… C’est pas Ringo qui amenait un morceau ! (Rires)
B : Il les amenait mais on les mettait de côté… All right, Ringo ! (Rires)
M : Et si ils jouaient un riff et qu’ils ne s’en souvenaient pas le lendemain, c’est que c’était un mauvais morceau et ça, c’est tout à fait vrai !… Ca, c’est le côté poppy du groupe. J’ai besoin de me raccrocher à une mélodie. J’ai du mal avec les groupes trop destructurés. J’aime bien aller voir un concert et pouvoir taper du pied. C’est important pour mon horloge interne. (Rires) Les trucs trop compliqués, ton cerveau a du mal à suivre, ton corps à du mal à suivre. Ca peut être une super performance, mais tu vas au concert et tu te souviens d’aucun morceau…
C’est marrant parce que le dernier groupe que j’ai interviewé, c’était Dewaere et je leur ai demandé si ils pensaient que le rock à guitares pouvait encore avoir du succés où si les années avaient été une sorte d’âge d’or et ils m’ont répondu que ce qui marchait et qui marcherait toujours, c’était les chansons…
D : C’est clair ! C’est ce qui restera !
E : Mais ça ne veut pas dire que le rock n’attire plus les foules… Plus autant, ça, on est d’accord ! Mais pourquoi pas un retour ? Moi, j’y crois ! Après, est-ce-qu’on peut dire que Smells like teen spirit est une chanson ? Oui… mais la définition est vague !
M : Le refrain est hyper fédérateur ! Le refrain est quand même fou !
E : En tous cas, c’est pas l’idée que je me fais quand on me dit une chanson…
M : Tu penses à quoi, plutôt Stewball ? (Rires)
E : Ah ouais, Hugues Aufray, il sait écrire une chanson !
Est-ce-que vous avez écouté le dernier album de Kim Gordon ? Je sais que Sonic youth a été un groupe assez important pour vous…
M : J’ai entendu trois morceaux. J’ai trouvé ça quand même pas mal mais je pense aussi qu’on en tirerait pas une ligne si c’était pas Kim Gordon. C’est la plus arty du groupe, je crois qu’elle peut taper sur une bouteille et faire hahahaha…Je l’avais vue en live il y a quelques années, avec Body/Head, putain, c’était un larsen de 30 minutes ! Heureusement qu’il y avait Disappears avant qui jouaient, c’était vraiment super ! Si c’était pas Kim Gordon, y’aurait eu personne dans la salle ! Mais je l’adore, elle est belle quand elle chante. Elle chante et elle joue pas bien mais c’est ça qui est bien ! C’est un membre vraiment important de Sonic Youth mais en solo… Thurston Moore a beaucoup plus d’impact, pour moi. Lui écrit des chansons !
D : Après ce qu’elle avait fait avec Free kitten, c’était un peu plus des chansons, c’était un peu moins expérimental…
M : Oui, mais c’était pas elles qui écrivait les chansons… Et donc, je n’ai pas tout écouté mais je vais l’acheter parce qu’en plus je trouve que la pochette est belle. Si elle vient jouer demain, j’irai la voir.
D : Elle joue au Poulpe demain, justement ! (Rires)
Et vous, ça vous arrive de travailler avec vos défauts ?
M : On ne fait que ça !
D : On n’est pas des vrais musiciens ! On sait se servir d’une guitare tant bien que mal et on fait comme on peut.
M : On en parlait avec les gens de Nurse… Il y a une différence fondamentale entre jouer seul et jouer en groupe. Il y a plein de gens très bons seuls dans leur domaine mais en groupe ça n’ira pas parce que c’est un autre process. C’est gérer les humeurs, les envies de chacun. C’est comme une famille, un peu. Moi, j’aime bien jouer en groupe parce qu’on est plus forts. En groupe, on va de l’avant, on va sur la route, on fait des kilomètres, il y a un côté un peu POWER MEN ALAWONEAGAIN !!! (Voix forte et accent de cow-boy assez indescriptible, NDLR). Il y a un côté believer, je sais pas comment expliquer… Demain, on ira encore plus loin que là où le soleil se couche… Lucky Luke, un peu !
E : Enfin Lucky Luke, il a quand même Jolly Jumper… et Rantanplan !
Alors, c’est qui, rantanplan, parmi vous ?
M : Je sais pas… C’est Laurent. Vu qu’il est pas là…
Il y a toujours pas mal de choses assez détonnantes qui se passent en Belgique. Quelles sont les découvertes, musicales ou autres, que vous voudriez nous faire partager ?
E : Si je devais en citer un, ce serait Millionnaire. C’est un peu un groupe emblématique pour moi. J’ai une petite fierté que ce soit quelque chose de Belge.
M : Millionaire forcément, Deus, forcément, Soulwax, forcément.
E : Des groupes qui ont façonné ce que les gens appellent un peu grossièrement le rock belge.
D : Actuellement, y’a la nouvelle scène noise flamande avec Shht, Guru guru, Raketkanon…
E : Et Le prince Harry, les copains avec lesquels on joue tout le temps…
M : Plus au sud du pays : Cocain piss. Ils sont de Liège et ils s’exportent bien. Steve Albini les adore. Il met leur tee-shirt quand il fait des tournois de poker.
D : Zwangere guy a un album vraiment fou, c’est un rappeur bruxellois qui chante surtout en flamand.
E : Shht, l’album est encore une expérience très bizarre à vivre. C’est vraiment un mélange de studio et de live, ce groupe, mais c’est hyper bien !
On peut peut-être conclure sur vos projets ? Est-ce-que vous avez un nouveau disque qui va sortir ?
D : Oui, on est en train d’en discuter avec le label. C’est ça être professionnel, on est prêts mais, pour sortir un disque, il faut 7 mois à partir du moment où il est fait ! Pour en revenir à tes premières questions sur le pourquoi de notre label, JB de Born bad était éventuellement intéressé pour sortir notre deuxième disque mais ça aurait pris un an à cause du planning, de la promo, etc. et on voulait le sortir vite. Il était déjà prêt depuis plusieurs mois. Ici, c’est pareil. On va l’enregistrer pendant la première moitié de l’année 2020. On aura le mix et le master au milieu de l’année et le label a besoin d’au moins six mois pour le sortir. Philippe est un puriste du vinyl, il travaille avec une usine qui est implantée en France, donc voilà.
Vous allez l’enregistrer avec Laurent ?
M : Ca se discute et, pour le moment, c’est encore secret !
Premier contact avec ce groupe piémontais qui publie là son deuxième album, sept ans après le premier. Neufs morceaux denses, construits. Télescopages de riffs massifs, breaks abruptes, flirtant avec le math-noise – de l’aveu même du groupe. Lorsqu’elle est la plus condensée, la plus lapidaire, la musique de Glad husbands n’est pas sans rappeler fortement un des parrains du genre, Dazzling killmen. « Out of the storm », « Spare parts », « Cowards in a row ». Expectorations vitales. Méchante envie d’en découdre. Rage bloquée qui sort en spasmes. Même la voix à quelque chose de la fureur étranglée de Nick Sakes, dans ces brulôts noisecore fumants. Ailleurs, « Things that made sense », « The Jar » varient les intensités, évoquent parfois un post-hardcore plus old-school, s’essayent à des inflexions plus mélodiques, jusqu’à la ligne presque pop de « Midas ». Une sorte d’identité plurielle qui ne s’appréhende pas forcément immédiatement mais qui donne certainement envie d’en savoir plus et d’en faire l’expérience en concert.