Oyster’s reluctance, Insignificant EP

Voix de crooner stoner disparaissant parfois sous les effets, sens du riff accrocheur, atmosphérique ou metallisant. Oyster’s reluctance manie tous les ingrédients de l’alternatif façon 90s et ce dernier EP (il est sorti en 2017) laisse présager des musiciens pas tombés de la dernière pluie, maîtrisant autant leur Mister bungle que leur Pearl jam, leur Mordred ou leur Tool. Pourtant à l’écoute, on ne peut pas réduire ce trio à la formule minimaliste (batterie/basse/voix) à un revival grunge/fusion même si ils auraient peut-être fait fureur à l’époque. Sur les cinq titres qui composent le disque, le groupe n’a de cesse de varier ses effets : plages athmosphériques, voix samplées, passages presque jazzy qui font astucieusement contrepoint aux coups de boutoirs noise qui suivent (Bulging eyes, mon morceau préféré). L’absence de guitare est une excellente chose, forçant a faire feu de tout bois et assechant un peu le son du groupe. De toute façon, la simplicité est toujours une qualité, que le dernier long morceau, Greed, exploite à plein avec son riff simplissime laissant toute marge de manœuvre aux mélodies éraillées et planantes du chanteur.

Ce groupe a clairement son univers et est peut-être à son meilleur quand il s’éloigne davantage de ses références. Cette impression est confirmée par les extraits de concerts qu’on peut visionner ici ou là et qui donnent bien envie de découvrir ce que Oyster’s reluctance peut donner sur scène, au naturel.

>>>>>>>>>> OYSTER’S RELUCTANCE

 

 

« Sonic Youth, mobylettes et album jazz de l’année » : une interview avec NURSE

Après la sortie de son premier album, à la fois attachant et impressionnant, sans parler de leurs prestations scéniques enflammées, une interview avec Nurse s’imposait. On a pris rendez-vous à leur local de répétition au Poulpe, enclenché le bouton On de la caméra et laissé filé l’enregistrement. Ben (chant), Ram (basse), Manu (guitare) et Simon (batterie) se sont prêtés avec bonne humeur au jeu de ce qui était au final plus une conversation en roue libre entre copains, un peu réécrite et recomposée pour que le résultat soit lisible et intéressant.

Première question un peu débile : votre album est sorti il y a un mois, est-ce que vous êtes contents ?

Nurse : On est contents! C’était très très long, deux ans, quasiment.

Manu : Trois ans pour composer, deux ans à enregistrer !

Pourquoi est-ce que c’était aussi long ?

Ben : J’ai mis énormément de temps à trouver mes lignes de chant. Il fallait que je digère le style qu’on avait mis en place tous les quatre. J’avais jamais écrit de chant mélodique, j’ai fait que du hardcore avant ! Et puis, il m’a fallu un an pour me trouver une technique d’enregistrement. Le studio, ça me gave. J’ai enregistré tout seul avec des enceintes. Je passe l’enregistrement. A fond – tu rentrais dans la pièce, ça faisait mal. Micro à la main, j’ai tout enregistré comme ça. C’est en prenant le temps que j’ai fini par trouver ça. Je pouvais faire ce que je voulais. J’étais pas content, je recommençais. Maintenant que je sais comment j’enregistre, je pense que ça ira plus vite à l’avenir.

A Ugine, juin 2016

Est-ce que vous pourriez me refaire l’historique de Nurse ?

Ben : Les deux garçons là (Manu et Ram) jouaient dans un groupe qui s’appelait Shivaz et moi, j’avais un groupe de fusion, Full dawa. On a commencé à se connaître sans jouer ensemble. Shivaz ont eu un mini succés local et ensuite j’ai monté un groupe de metal-hardcore qui s’appelait NFO. Eux, ils avaient un peu envie d’arrêter Shivaz. Et moi, ça me disait bien de faire autre chose que du métal. On a monté ce projet – Borefat cohesion – on a fait un petit disque auto-produit. Quelques concerts. Les gens aimaient bien. Et puis, on a voulu enregistrer un nouveau truc. Sauf que le batteur est pas venu. Du coup, ça s’est arrêté.

Manu : Et le jour même, j’ai appelé Simon.

Donc ça, c’est l’ancêtre de Nurse…

Ben : Y’a encore un truc entre les deux. On a composé avec Simon, sur les cendres de Borefat. En faisant un peu le même style mais en changeant un petit peu. Ca s’appelait Latte machiatto (Fou rire général). On a fait un concert au Poulpe qui s’est avéré être une catastrophe. En plus, les gens qui aimaient bien Borefat nous attendaient, ils sont tous venus nous voir et on s’est vraiment vautré. On s’est pas revu pendant trois mois. Pas d’appel, pas de répète, rien. Silence radio. Puis, on s’est revu, on s’est remis à composer mais en voulant faire autre chose. En partant de l’album « Sonic nurse » de Sonic youth.

Rami : On a jammé, on a fait un morceau. C’était cool. Calme, aéré par rapport à ce qu’on faisait avant. C’est le deuxième du disque. Tout est parti de là. C’est tout pompé sur Sonic Youth, Nurse !

La Spirale, Annecy, septembre 2017

Qu’est-ce qu’il représente pour vous, cet album de Sonic youth ?

Ram : C’est pas celui que les gens préfèrent. Il y a ce morceau, le cinquième,, Stones.

Ben : C’est hyper beau.

Ram : Ce morceau, il est incroyable.

Est-ce que vous pouvez me dire un mot sur la pochette de l’album ?

Ben : C’est le grand-père de Manu, dans le nord de la France.

Simon : On avait une idée super et c’est tombé à l’eau…

Ben : On voulait faire un portrait d’un pote, qui a une tête – une gueule, quoi. Il nous avait dit oui et puis plus de nouvelles et puis il a dit je suis pas photogénique, ça sert à rien.

Simon : En fait, cette photo, plus tu regardes et plus tu vois qu’il y a tout. Le Ricard, la grosse clope, des bouteilles de gaz, tu sais pas trop, les briques, un chien et puis surtout, il y a le grillage qui prend toute la place. Et ça, c’est génial !

Manu : C’est marrant qu’il ait dit oui… Je suis pas là pour longtemps, va-z-y ! Il a le même âge que moi…

Ram : Il y a cinquante ans…

Ben : On voulait pas un truc en rapport. On voulait pas qu’il y ait le nom. On est content que ce soit une photo qui nous appartienne.

Tu peux toujours voir des rapports…

Manu : Ouais, là, mon grand-père, il montait son affaire, c’était une période merdique. Il était en usine avant. Tu vois ce que ça pouvait être… Il vivait dans une baraque ouvrière à côté de l’usine. Bossait six jours par semaine. Voisins avec ses collègues. Il monte son truc. C’est un peu un échappatoire, quoi. Tu retournes le disque, tu vois l’autre image. Tu te dis : putain, il avait envie de se barrer !

Une question un peu Michel Drucker : on évoque souvent les années 90 quand on parle de votre musique, pouvez-vous nous raconter vos années 90 ?

Ram : On est plus de la fin des années 90. Le lycée, Nirvana, Noir désir…

Ben : En 4e, j’avais 15 ans. Je répétais avec un pote qu’avait une mobylette pourrie et j’avais la batterie dans le sac ! J’étais le batteur et je jouais sur une batterie Mickey !

Ram : C’était le moment où, même dans le rock, on commençait à affirmer notre truc. Moi c’était l’alterno français, Les Shériffs…

Simon : Les tout premiers CD, Nofx…

Ben : Et la découverte des premiers groupes un peu durs. Le premier disque que j’ai eu, c’était War de U2. J’écoutais beaucoup, jusqu’en 5e. Après, mon frangin a dû acheter Tostaky. J’ai écouté. Je me suis dit, putain, c’est quoi ce truc-là ? Cette intensité, cette énergie… Même maintenant, tu me mets Tostaky et tu me mets n’importe quel Metallica, je trouve que Noir désir, c’est plus dur. Mais à l’époque, avec le son heavy metal, la batterie, la grosse prod, quand t’as 15 ans, ben… je suis allé bien dans le metal. Assez loin. Pour revenir, tranquillement. Je suis revenu à Nirvana bien plus tard. J’aimais bien Nirvana mais j’étais pas hyper fan.

Simon : Et puis, c’était les premiers concerts, les Plateaux rock à Annemasse où toute la scène alterno passait. Les Thugs, No one is innocent, Les Shériffs, Silmarils… Tu voyais le batteur torse nu et tu te disais Waouh ! C’est ça que j’ai envie de faire !

Vous êtes dans le scène locale depuis un paquet d’années, comment est-ce que vous l’avez vue évoluer ? Comment est-ce que vous la jugez maintenant ?

Ram : Ca bouge moins.

Simon : Tout ce qui est SMAC – genre Chateau-rouge – au début, on trouvait ça plutôt cool. Et maintenant j’ai l’impression que ça a tué tous les petits lieux. Les bars. J’ai l’impression qu’avant c’était plus simple de jouer pour un groupe qui commençait.

Ram : Au début des années 2000, il y a eu une pétée de petits festivals. Il y en avait partout !

Ben : Dans les villages, ils ne faisaient plus de bals, ils faisaient des festivals ! Tous les petits groupes – comme mon premier groupe, on était vraiment nuls – tous jouaient ! Ca, ça a disparu. Avec NFO, on jouait avec des groupes de reggae, de chanson, avec les Shivaz. C’était tout mélangé ! C’était cool !

Simon : Je pense que c’est la professionnalisation de la musique qui a tout tué. Les groupes prennent plus cher parce que c’est devenu leur job. Tous les prestataires prennent plus cher.

Manu : Les Rockailles, au début, ça marchait bien, on s’est tirait à peu près (Manu a fait partie des premiers collectifs d’organisations du festival des Rockailles, NDLR). On faisait passer des groupes qui prenaient peut-être 2000 balles et, en deux ans, c’est monté à 15000 boules… En fait, pour que ça marche, fallait faire en sorte que ça te coûte rien ou pas grand-chose. Nous, on voulait faire ça pour faire passer des groupes qui nous faisaient envie et puis, rapidement, on a été pris à la gorge parce qu’il fallait négocier. C’était pas notre boulot !

Ben : Business, quoi. Il y a un gros creux. Comme un peu partout, je pense…

Les Tilleuls, Annecy, septembre 2017

Ben, t’as aidé à organiser des concerts dans des lieux alternatifs comme la Machine utile. Comment vous vous placez par rapport aux lieux plus institutionnels ? Est-ce que vous faîtes une différence ?

Ben : Ah ouais, moi je fais une énorme différence. Je ne leur parle pas de la même manière. Après, le truc, c’est que j’y travaille, dans les lieux institutionnels (Ben est éclairagiste, NDLR). J’aime bien, comme pour tout, avoir un pied dans plein de trucs. Ca me fait marrer. J’aime bien faire la lumière dans des gros machins et j’aime bien les squatts où il y a pas de lumière. En vrai, je prend plus de plaisir dans un squatt où il y a pas de lumière ! Musicalement, par rapport à ce qui se passe. Après mon métier, ça reste la lumière. J’ai une vraie passion pour ça.

A ton avis, quelle devrait être la relation entre les deux ?

Ben : Il n’ y a aucun problème. Pourquoi les grosses salles pourraient pas programmer un groupe de noise ? Je considère que c’est leur rôle. C’est ce qu’ils font, plus ou moins. Le problème, c’est la fermeture des grandes scènes à la scène indé et à la scène locale. Ils ouvrent leur petite salle volontiers, mais ils l’ouvrent parce que c’est dans leur cahier des charges, pas par plaisir. Enfin, c’est pas vrai, ça dépend des programmateurs. Le problème, c’est le dialogue, on parle pas la même langue.

Ram : Mais bon, nous, en tant que groupe, on a aucun combat contre l’institutionnel…

Ben : Ouais, mais Simon il est en colère. Et moi aussi, mais en même temps j’y suis alors je comprends plein de choses. Mais il a aussi des choses que je ne comprends pas. Je pense depuis très longtemps que les gens qui sont à ces postes, ils devraient changer tous les cinq ans. Le mot est peut-être fort mais ils sont blasés. Un peu. Et puis sur les grandes scènes, ils se battent avec les prods. Exactement comme ce que Manu t’as raconté tout à l’heure. Le problème c’est que quand t’as des mecs qu’ont pas de culture alternative, ils s’en remettent au tourneur qu’il connaissent et on a toujours les mêmes groupes.

Simon : Et on en vient au truc de la professionnalisation de la zique… Et puis, ils prennent le problème dans le mauvais sens. Le public, en fait, il faut l’habituer. Genre le Poulpe, maintenant ils ont leur belle salle. C’est rarement vide, quand même. Ils ont réussi à fidéliser des gens qui vont voir les concerts, même si ils ne connaissent pas le groupe… Et les grosses salles, c’est : le tourneur nous a vendu un truc, c’est bien, on va remplir notre salle. On est content ! On se pose même pas la question de faire jouer un groupe en première partie. Je sais pas… Pour moi, c’est juste pas logique… Pour ces gens, ça paraît un truc impossible de faire jouer un groupe local avant deux autres groupes, alors que les assos elles font jouer quatre groupes dans la soirée et c’est cool. Ca se passe hyper bien.

Ram : Mais parce que les salles c’est les cantonniers de la musique ! Ils sont dans leur petit rythme tranquille, faut pas trop changer ! C’est des cantonniers de commune, j’ai rien contre mais faut dire les choses…

Ben : C’est dur parce qu’on arrive pas à foutre nos groupes là-haut…

Simon : L’argent des subventions, il vient de qui ? Il vient de nous, il vient des impôts. Alors tu en fais profiter tout le monde. Je demande pas d’être payé 1000 balles à chaque fois que je vais jouer mais un minimum de considération. Tu files 100 balles au groupe. Les groupes de lycéens, tu leur files à bouffer. Tu leur files un jeu de cordes ! Tu vas voir un magasin de musique, tu mets leur logo au bas de l’affiche. Les solutions, elles existent. C’est juste que les gens en ont rien à branler !

Il y a des fois, on connaît des groupes étrangers qui déchirent qui tournent en France et qui trouvent à peine quelques dates, on se dit bon sang c’est dommage de pas pouvoir avoir accés à ces salles…

Simon : Les mecs à la programmation, ils lisent les Inrocks et puis c’est fini.

Ben : Et puis les coups de pression du style : OK, je te fais celui-là un peu moins cher mais par contre tu me prends celui-là. C’est du business. Quand t’essayes de discuter, tu parles pas le même langage. Nous, en toute sincérité, avec le recul, on a pas tous les tenants et aboutissants de ces gens-là. C’est sûr. Et eux, ils ont une vision qui est fermée.

Simon : Au début, il y avait une émulation mais maintenant, ils programment la scène locale et il y a personne. Pourquoi ? Parce que les gens peuvent nous voir ici au Poulpe ou au Moderne avant et c’est vachement plus sympa !

Ben : Moi, y’a un truc qui m’a énervé. Au café à Château-rouge dans leurs soirées intermèdes – parce qu’il faut qu’il y ait un nom à ces soirées, comme si les gens en avait quelque chose à foutre – ils programment un gars qui fait des reprises. Des reprises à Chateau-rouge ! Le mec – que j’apprécie, hein – il joue que dans des cafés où les mecs veulent se faire du fric, OK. Mais à Chateau-rouge ? Dans un lieu subventionné ?

Simon : Il y a mille groupes qui veulent jouer, putain…

La batterie de la caméra qui enregistre l’interview s’arrête à ce moment-là. On n’y fait plus attention. Le flot de la conversation nous mène jusque tard dans la nuit. Ben raconte son expérience comme hurleur dans un groupe de jazz d’avant-garde local, qui sera finalement élu album jazz de l’année. On évoque les projets du groupe, les concerts passés et à venir, un projet de label. A suivre…

Toutes les photos de Nurse sont tirées de l’excellent blog photo Lowlightconditions. Merci à lui !

>>>>>>>>>> NURSE

« emo pop-punk social club » (Sport – Tilleuls, 29 juin)

Vendredi dernier au Tilleuls. Avec un seul groupe, Sport. Ils ont vraiment une thématique autour du sport. Sur leurs premiers disques, tous leurs morceaux avaient comme titre des événements sportifs ou des célébrités du sport. Mais ils ont l’air de s’être lassés.

Emo pop-punk foutraque et adorable, dans une chaleur à crever. Des échos de Braid, Get-up kids, le label Jade tree.

Public toujours trois fois trop nombreux pour le lieu. Dégueulant largement sur le trottoir. Pas littéralement, hein.

Pas cette fois.

>>>>>>>>>> SPORT

« Football : 0 / Hardcore punk survolté : 10 000 » (Tuco, Joliette – La makhno, 27 juin)

Peu de monde ce soir-là à l’étage de l’Usine. A vrai dire, il y a à peine plus que notre groupe de copains lorsque Tuco plaque ses premiers accords.

Plaisir de retrouver leur noisecore massif et tourmenté. Ces longs morceaux pleins de bifurcations soudaines, de répits trompeurs, où suinte la tension malsaine.

Fidèles à eux-mêmes, leur performance est un rouleau-compresseur. On reconnaît quelques vieux titres de leur premier EP, comme le phénoménal Numb et son accélération qui te colle au mur du fond. Le premier album des Suisses devrait sortir ces jours-ci, en format numérique, en attendant un disque à l’automne.

Les mexicains de Joliette, eux, étaient une découverte pour pas mal de monde. En vérité, il y a pas vraiment besoin de beaucoup plus que deux minutes pour comprendre que ce groupe a quelque chose de très spécial.

   Putain de réacteur nucléaire où se fracassent sans discontinuer des atomes de hardcore hurlé, de noise surpuissante. Bouts de mélodies qui traînent en lambeaux dans le chaos et te prennent à la gorge. Breaks constamment sur le fil de la lame.

Le pire c’est que les jeunes Mexicains sont très cools sur scène, avenants et sympathiques. Derrière les fûts, le batteur prend le temps de remonter ses lunettes sur son nez d’un air flegmatique entre deux rythmiques hallucinantes de puissance et de groove. Machine !

Le public s’est massé devant la petite scène. Scotché. Chaque nouvel assaut sonore est accueilli avec ferveur. On en loupe plus une seconde.

C’était fou, ce concert ultime à prix libre devant une poignée de guignols. Au moment où tous les yeux, les oreilles et les porte-monnaies sont tournés vers la folie estivale du Hellfest et son hardcore à grand spectacle.

Nous, on a pas vu le match et on ira pas au Hellfest. Mais, ce soir-là – même si c’est évidemment con de le formuler comme ça – on nous empêchera pas de penser qu’on a vu le meilleur groupe de hardcore du monde, hé !

>>>>>>>>>> TUCO

>>>>>>>>>> JOLIETTE

« L’oeil du cyclone » (MoE – Cave 12, 20 juin)

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« Imagine un mélange entre Napalm death et Shellac. » C’est la comparaison rapide que j’avais trouvée pour décrire MoE à un copain qui ne connaissait pas. « Pas facile. », il avait répondu. Et pas tout a fait exact non plus, mais ça donne une idée de pourquoi ça valait largement le coup de faire le trajet jusqu’à Genève et Cave 12 ce mercredi-là.

Quasiment déserte et très tranquille lorsqu’on arrive. En fait, je crois que Cave 12 ne se remplit qu’à la nuit. Les Norvégiens – qu’on veut rencontrer pour une interview –  sont déjà là. Mais, fatigués par un trajet depuis Oslo beaucoup plus long que prévu et parsemé d’incidents de sécurité inquiétants, on ne les croisera pas trop avant le concert.

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Il débute devant une audience assez restreinte. On est mercredi et il fait très beau et puis c’est la coupe du monde, hein. Pas grave, le trio est là pour nous en mettre plein les oreilles et les mirettes et arborent des éléments de costume à paillettes. Batteur imperturbable sous sa cagoule fourrée qui lui donne des airs de teletubby gothique, qui casse sa caisse claire dès les premières secondes mais continue sur les toms comme si de rien n’était. Rien n’arrête la machine MoE quand elle est lancée.

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Relents de doom/stoner lourdingues. Pics de tension punk hardcore. Crise noise aigüe, soubresauts schizo, tension qui s’affole. MoE brouille les pistes, orchestre un chaudron brûlant où se fond tout ce qui est sauvage, tout ce qui se tend, éructe, se déchaine.

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Cette tension de malade, ces éclats de folie en rafales  sont servis par la technique irréprochable des trois musiciens confirmés, qui sont tous actifs dans des projets très différents, jazz, improvisé ou autre. Faut écouter sur disque pour comprendre – quoiqu’au final l’expérience en live soit assez différente, très organique.

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Pas de pit formaté ici. Pas de violence ritualisée. Sans forcer, sans rien imposer, le groupe communique juste une folie qui infuse progressivement dans le public présent et le concert se termine dans des danses sauvages et des cris enthousiastes.

La soirée se terminera pas des rencontres et discussions bien agréables, au son de la sélection « pre-summertime » des DJs locaux. Black flag, c’est en effet totalement pre-summertime. Cave 12 ne ment jamais.

>>>>>>>>>> MOE

 

 

« Surréaliste pop » (Erwtensoep – L’Angle, 15 mai)

Presque un mois de passé depuis ce concert d’Erwtensoep à l’Angle – l’expace exposition de la MJC de la Roche-sur-Foron – qui clôturait l’exposition de Sabien Witteman.

Qu’on retrouve au clavier, au chant, à l’accordéon et à la percussion dans ce duo qu’elle forme avec son mari. Madame en one-woman orchestre et monsieur en guitare demi-caisse et costume doré.

Pop excentrique. Parfois des airs de Rita Mitsouko no-wave, de cabaret gothique synthétique. Bref, un peu le pendant sonore des peintures de l’ancienne batteuse de The Ex, – maintenant installée en Bourgogne – qui faisaient le décor de ce chouette petit concert arty.

>>>>>>>>>>>> ERWTENSOEP

« Douce violence » (Amanda Blake GL – La Bobine, 19 mai)

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Rédactrice invitée en direct de Cuvette city : Anne von Klüz

C’est dans une salle comble et un public chaleureux que le trio « Amandadesque » nous a régalé pour cet apéro concert. Plus d’une heure de live pour inaugurer leur album auto-produit, « Sans titre », comme un de leur bien-nommé morceau.

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Amanda Blake GL, c’est qui ? Deux nanas et un gars, entre Allevard et Grenoble. Géraldine au chant, guitare, basse et synthé, Émilie qui alterne la guitare et la basse, elle donne aussi de sa voix et Fred aka Gsejd Landscape à la batterie électro-acoustique.

Amanda Blake GL, c’est quoi ? Du post-punk ? Du rock français ? De la pop noisy ? Tantôt synth’ pop ? Ça fait beaucoup d’étiquettes tout ça… Amanda Blake GL a plusieurs facettes, les ambiances varient avec les changements d’instruments. Des mélodies et des mots restent dans la tête. Les textes sont finement ciselés « à la hache » avec des paroles en français s’il-vous-plaît. Des textes à la poésie écorchée d’une suave mélancolie. Des mots, des mélodies resteront. Des émotions.

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De l’énergie aussi, sur « Cobalt » où elles convoquent le mercure, l’étain, du cobalt, du cuivre, de l’or et « même de l’arsenic ». Le premier morceau de l’album, tout en montée, jaillissement et fracas. De la matière, de la musique et des mots.

Des paroles magnétiques et une hargne plus ou moins contenue sur « Sans titre » et sa super idée de composition. Jeux de mots à la poésie « sans faille ». Le genre de morceau où tes poils se dressent « sans détour », « sans cesse, sans cesse ».

Amanda c’est comme une montée de lave, sur « Ville-sentiment » référence à Clermont-Ferrand, hymne à la terre d’origine de Géraldine. Une musique « taillée dans la pierre noire ». Il y avait apparemment pas mal d’Auvergnat(e)s ce soir-là si l’on se fie aux gesticulations du public. Les enfants ont aussi bien gigoté devant avec leurs casques anti-bruit.

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Une musique avec des contrastes. Il y a des titres plus doux, des ballades avec « les hirondelles », « K.O » et son charme synth pop, le trippy «beauté des voyageurs » ou encore le blues de « dernière saison » qui clôt l’album.

Chez Amanda Blake GL, il y a des mélodies et des riffs, il y a des solos et des ruptures, des envolées et des éclats, il y a du velours et de l’acier. Il y a une violence douce.
Une musique « avec de l’ombre, de la lumière ». Une musique a écouter « sans conteste ».
Amanda Blake GL, quand t’écoutes leur album c’est comme la cancoillotte (ou l’aligot ?!), tu commences, tu t’arrêtes plus !

>>>>>>>>>> AMANDA BLAKE GL

A night with The Ex : an interview with Arnold de Boer (The Ex)

 

 

Oh, damn ! Pretty stoked to present our first collaboration with David « Almighty » Livegeneva TV : a lenthy interview of The ex’s singer Arnold de Boer, mixed with live footage. It’s not perfect but it’s cool. Enjoy !

Oh, bon sang ! Bien contents de présenter notre première collaboration avec David « Tout-puissant » LivegenevaTV : une longue interview du chanteur de The ex, Arnold de Boer, mixée avec des extraits de concert. C’est pas parfait mais c’est cool. Enjoy !

>>>>>>>>>>> THE EX

>>>>>>>>>> LIVEGENEVATV

Piniol, « Bran Coucou » LP

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Piniol, c’est un groupe qui n’a peur de rien. C’est la contraction de Ni et de Poil – groupes dont on retrouve ici les membres – mais ça pourrait aussi bien être celle de pignouf et guignol. Piniol, c’est un peu comme si le math-rock avait décidé de défier les monuments de la musique amplifiée, ses sommets les plus ambitieux, les plus boursouflés. Rock progressif, jazz-rock, métal, opéra-rock peut-être bien, et j’en passe. Commandante Zappa nous voilà. De ces musiques, Piniol a une énorme envie et ne fait qu’une bouchée. Bouchée double en fait puisqu’il s’agit d’un groupe dédoublé – deux guitares, deux basses, deux batteries, seul le clavier n’a pas son double – Piniol croque tout, concasse, digère et régurgite tout en sept grandes salves surpuissantes et baroques où on en verra vraiment de toutes les couleurs. Il faut être d’humeur fantasque mais c’est assurément un disque de malade.

Piniol, « Bran coucou » (Dur et doux, 2018)

>>>>>>>> PINIOL

>>>>>>>>>> DUR ET DOUX

« La branche déviante de la famille » (Pilier, YC-CY – la Makhno, 10 mai)

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A proprement parler, on peut pas vraiment dire qu’il y ait d’organisation consacrée au noise-rock dans la région Annecy/Genève. Ca reste un peu le vilain petit canard, la branche déviante de la famille. Le cousin pas sortable. La cousine transgenre. Mais, au final, il n’y a pas trop à se plaindre car, dans la programmation des uns ou des autres, il y a régulièrement des noms inespérés, des coups de folie.

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La soirée commençait avec le hardcore-punk des locaux de Pilier. Eruction continue de rythmiques rapides et de riffs rentre-dedans, sans temps mort, dans un esprit très proche des Annemassiens de Wrensh. Hardcore droit au but, sans le métal en quelque sorte. Bon sang, heureusement qu’il y a encore des groupes comme ça.

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On sent le groupe habitués du lieu. Et le public, qui assure l’ambiance joviale. Ils se laisseront même convaincre par un rappel.

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Les Suisses allemands de YC-CY  ont peu joué par ici. Ils viennent de sortir leur 2e album sur le label allemand X-Mist et faisaient une courte tournée de trois dates dans l’est de la France.

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Leur musique semble provenir d’un lieu non-cartographié. Atmosphérique et bruitiste, violente et émotionnelle, dansante et expérimentale. A équidistance du post-punk, du hardcore, de la noise. A l’image du génialissime Kepler-186f, qu’il joueront en deuxième et qu’il faut absolument écouter. Ce morceau mérite à lui seul le nom de Todestanz – Danse de la mort -, le titre de leur album.

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Pulsation puissante de la batterie, réduite à sa plus simple expression, qui capte les regards. Bassiste en retrait, les yeux clos – des images de Joe Lally de Fugazi reviennent en flash. Sonorités incongrues que le guitariste tire de son instrument. Des airs de synthé vérolé. Chanteur coincé aux abords du public, plié sur son micro.

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La charge fût relativement brève mais intense. Comme leurs copains allemands de YASS, YC-CY dessine un noise-rock du futur – ou du présent, tout simplement – qui donne grandement envie de continuer à suivre ce que donne ce groupe.

 

>>>>>>>>>> PILIER

>>>>>>>>>> YC-CY