Ce trio originaire de Turin – la porte à coté, quoi – a fait un passage remarqué à la Spirale à Annecy en septembre. Leur dernier disque, intitulé oneUp donc, est sorti uniquement en ligne. Peut-être faute de label. Les temps sont durs.
Mais The Sloks n’est pas du genre à lâcher l’affaire pour si peu. La passion tenace et le jusqu’au-boutisme transpire des 7 titres de ce qui pourrait être un 10’’. Tous taillés dans un rock’n roll garage tendu, toutes pédales de réverb et de fuzz dehors, et qui a quelque chose de minimaliste qui lui va comme un gant (une basse pointe le bout de son nez sur un des titres mais je ne suis pas sûr qu’elle rajoute grand-chose).
Mais The Sloks ne seraient pas The Sloks sans la voix d’Ivy Claudy. Une voix qui joue un jeu très particulier. Souvent plaintive, geignarde, suintant le malaise et la colère froide, elle prend à contre-pied la musique pleine d’allant. Répétitive et parfois monocorde, elle horripile, tend le nerf. Elle débite des histoires qu’on devine d’adolescence rebelle, teigneuse (Thats not me), de vengeance dans Tank of Gasoline (l’essence, matière inflammable chère au rock perturbé – que ce monde périsse par où il a pêché…). Elle atteind des sommets dans Use me, transpirant le défi, la détermination froide. On s’en est pris plein la gueule mais c’est pas pour ça qu’on va la fermer. Ni baisser le regard. Et jusqu’à exploser dans des rugissements, pris dans la tourmente d’une musique aux allures d’exorcisme.
Cette voix sévèrement perturbée imprime sa marque à la musique du groupe. Elle contraste avec les ritournelles garages, comme si un teenage movie bien inoffensif virait au carnage psychopathe sur fonds de rock n’roll endiablé. La fête est plus folle quand c’est une surprise. A certains moments, la guitare elle-même semble s’imprégner de cette folie et ce sont mes passages préférés. Elle se durcit pour dériver vers quelque chose de désarticulé. Sur la fin de That’s not me, par exemple, ou dans Close the door, qu’on pourrait carrément rapprocher du post-hardcore d’un Drive like Jehu.
Bref, oneUp est un grand disque de rock mauvais où un groupe s’approprie une forme pour exprimer quelque chose de personnel. L’essence du punk, quoi.
Et ça s’écoute ici.